Le pitch : l'histoire de Rome de la victoire de César en Gaule à l'accession d'Octave Auguste à la tête de l'Empire.
Diffusés entre 2005 et 2007, les 22 épisodes des deux saisons de Rome (12+10) affichent une qualité exceptionnelle, que cela soit d'un point de vue scénaristique (la grande et les petites histoires sont passionnantes), visuel (Rome et Alexandrie sont visibles comme jamais à l'écran) et psychologique (chaque personnage est fouillé).
Le voeu de John Milius et Bruno Heller était de reconstituer le plus fidèlement possible les 20 ans qui séparent la victoire de César sur Vercingétorix et celle de Octave sur Marc Antoine. Chaque saison ayant bénéficié d'un budget conséquent (100 millions pour la première, 125 pour la deuxième), il aurait été tentant d'édulcorer le propos. Mais vu que la série sera diffusée essentiellement sur des chaînes privées ou à péage, les producteurs ont pu aller très loin dans les scènes très crues, violentes ou dotées d'un langage orduriers.
L'idée géniale de Rome est de faire voir la montée de l'Empire par les yeux de deux soldats que tout oppose : le centurion Lucius Vorenus et le légionnaire Titus Pullo. Le premier est incroyablement rigide, fidèle à la République et à ses engagements envers ses chefs (César, puis Marc Antoine) tandis que le deuxième navigue à vue, sans vraiment se préoccuper des conséquences de ses actions.
Evidemment, les deux personnages vont évoluer. Une succession de drame va ébranler les certitudes de Lucius tandis que Pullo, ayant sauvé une esclave, va petit à petit tenter de se construire une vraie vie. Il est ironique de voir que Pullo, bien moins prévoyant que Lucius à propos de son avenir, saura choisir la bonne personne, à savoir Octave qu'il cotoiera dès l'adolescence du futur empereur.
Les deux soldats vont vivre les grands évènements des années -50 à -30, allant jusqu'à en influencer certains (l'agression de Marc Antoine qui précipite la venue de César à Rome avec son armée, la rencontre avec Cléopâtre). Ils vont fréquenter à la fois la très haute société de Rome et sa plèbe la plus crasse. De cette dichotomie, la série permet d'explorer tous les aspects de la vie romaine : on passe des rues sombres et crasseuses de l'Aventin aux palais des familles les plus riches avec leur cortège de fêtes, mais aussi de complots.
Car la violence est omniprésente dans la série. Violence physique bien sûr, qu'elle découle des différentes batailles des guerres civiles (dont une extraordinaire reconstitution de la bataille de Phillipe) ou des assassinats dans Rome, mais aussi verbale avec l'opposition entre Atia et Servillia, deux femmes cherchant à survivre à travers les complots politiques. Et si la première, mère d'Octave, parviendra finalement à ses fins, ce sera à travers la perte de l'amour de sa vie, tandis que Servillia, dévastée par la mort de son fils Brutus, finira par se suicider après avoir maudit sa rivale.
Alternant entre l'Histoire et les aléas de la vie des personnages, Rome propose donc 22 épisodes passionnants, riches en rebondissements, mais jamais tape à l'oeil. Le fait de tourner la série en Italie, comme au temps des grands péplums, donne évidemment une patine historique incontestable. La figuration italienne rajoute encore dans l'authenticité.
Mais la série se démarque de la version classique des péplums des 60's. Les recherches récentes ont montré que les Temples étaient peints, que la Rome pré-impériale ressemblait plus à une bidonville qu'à une capitale ultra-ordonnée. La représentation de la religion romaine, très complexe, a rarement été vue ainsi sur un écran. Enfin, des centaines de détails enrichissent encore la série. Citons quelques exemples comme la scène où des Gaulois vivant à Rome récupère le corps de Vercingétorix , jeté aux ordures comme un vulgaire déchet après le triomphe, pour lui donner une crémation digne de ce nom , les rapports complexes entre maîtres et esclaves ou la représentation des collèges, ces sociétés qui, telle des mafias modernes, possédaient un pouvoir occulte réel.
Une bonne série télévisée se doit de faire évoluer ses personnages. Rome pousse ce concept dans ses derniers retranchement à travers la montée en puissance d'Octave mais surtout la transformation de Marc Antoine sous l'influence de Cléopâtre. Le fier guerrier devient un être perdu dans ses fantasmes au grand dam de ses soldats. Certains pourront peut être reprocher cet aspect quelque peu "moralisateur", mais le fait est que Marc Antoine a vraiment perdu la tête en devenant l'amant de la dernière reine d'Egypte. Cela conduira à sa perte.
En résumé, 22 épisodes d'une richesse incomparable, sublimés par le Blu-Ray. Et quand on y ajoute d'excellents bonus (making of, éclairages historiques, commentaires audios passionnants et pistes interactives sur les différents lieux et personnages), il est clair que Rome est une série que l'on se doit de posséder !
Enfin, préférez la VO à la VF. Elle est incontestablement plus riche, plus nuancée et participe à la réussite totale de Rome !!