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24 janvier 2015 6 24 /01 /janvier /2015 11:35
Exodus (**** 1/2*)

Le pitch : En découvrant la vérité sur ses origines, Moïse va se dresser contre celui qu'il considérait comme son frère, Ramsès.

L'histoire de Moïse a été représentée plusieurs fois au cinéma. Les 10 commandements paraphait littéralement les Saintes Ecritures, le génial Prince d'Egypte prenait plus de libertés mais offrait également une lecture très sérieuse.

Avec Exodus, Gods and Kings, Ridley Scott a voulu donner un autre souffle aux 10 commandements. Il ne s'est pas laisser enfermer dans le carcan de l'adaptation ultra fidèle. Au contraire, il a cherché à rendre plus réalistes, voire à expliquer les plaies d'Egypte tout en n'occultant pas le "merveilleux" de l'histoire, avec notamment la présence de Dieu incarné par un petit garçon. Mais ce garçon existe-il ? Ou bien est-ce un produite de l'imagination de Moïse après sa chute dans la montagne ?

Mais revenons aux fondamentaux. Au départ se trouve donc la narration de la fin de la captivité des Hébreux en Egypte telle qu'on peut la lire dans l'Ancien Testament. Tout le monde la connaît : le massacre des innocents, la survie de Moïse placé sur le Nil dans un berceau, découverte par une princesse et élevé comme l'égal de Ramsès. Puis la révélation de ses origines, l'exil, la rencontre avec Dieu, le retour en Egypte, les plaies, la libération, la traversée de la Mer rouge, le veau d'or et l'écriture des 10 commandements avant le retour à Canaan.

De ce fait, Scott ne montre pas les origines de Moïse (quelques phrases suffisent à la raconter) , ne s'attarde pas sur le veau d'or, ni sur les rivalités avec les autres chefs hébreux. Il se concentre sur 3 thèmes : la rivalité avec Ramsès, les plaies,  la traversée de la Mer rouge.

Et autour de ces trois grands passages, il va utiliser au mieux (et le mieux chez Ridley Scott, cela veut magistral !!) ses décors, ses acteurs, ses effets visuels !! Oubliez le côté un peu kitch des 10 commandements et contemplez la splendeur de l'Egypte pharaonique. Il fallait le talent visuel inégalé du réalisateur anglais pour nous plonger dans ce monde ô combien éloigné du nôtre, que l'on croit connaître mais qui, en fait, reste encore très mystérieux , y compris pour les archéologues les plus avancés. Mais, à la différence de certains tâcherons que je ne nommerais pas, Scott ne fait pas dans le m'as-tu vu. Comme pour la Rome de Gladiator , l'Angleterre de Robin des Bois, l'Amérique et l'Espagne de 1492 ou la Jérusalem de Kingdom of Heaven, il se "contente" de poser ses caméras et de filmer. Pour lui, et il l'a souvent affirmé, il ne tourne pas de films historiques : il tourne des films comme s'ils étaient contemporains. C'est sa force et de ce point de vue, c'est une fois de plus irréprochable, énorme, grandiose et beau !

Le travail sur les détails, les costumes, les maquillages, les objets... Rien n'est laissé au hasard ! Le réalisateur sait ce qu'il veut, se refuse au moindre compromis et veut que ses films soient vu sur un grand écran. Comme je plains les égarés qui vont télécharger Exodus et le regarder sur leur PC !

 

Maintenant, disposer d'un superbe écrin est une chose. Le remplir en est une autre.

Et sur ce point, le film n'est pas réussi à 100%.

 

S'il n'y a rien à dire sur la progression de l'histoire (absolument aucun temps mort) ou sur la puissance du thème , le script manque une de ses cibles, et non la moindre : la relation entre Ramsès et Moïse. La faute à un Ramsès II plus proche de la réalité historique (l'historiographie récente a quelque peu revu à la baisse la grandeur de son règne, notamment la bataille de Kadesh ou certaines réalisations monumentales qu'on lui prête) mais finalement pas assez fort pour s'opposer à un Moïse interprété à la perfection par Christian Bale.

 

Car, on le sait depuis Hitchock , plus un méchant est réussi, plus le film est réussi. Ramsès ici n'a pas la présence magnétique de Yul Brunner ni la colère de son avatar animé dans Le prince d'Egypte (il est vrai que le dessin animé de Dreamworks parlait plus de la déception de Ramsès de voir Moïse emprunter un autre chemin). Et la phrase où il rappelle sa "divinité" sonne creuse. Ce n'est pas l'interprétation de Joel Edgerton qu'il faut remettre en cause, mais le personnage tel que défini par le script. Ramsès n'est pas tout puissant. Il se conduit comme un tyran (la pendaison des Hébreux), mais n'impose jamais vraiment sa volonté. Il semble le jouet de sa mère, de ses conseillers. Sa scène finale où il erre comme un égaré sur la plage après que son armée ait été anéanti par le reflux de la mer rouge en dit long sur sa condition. Il ne contrôle pas grand chose, alors que Moïse ne connaîtra quasiment pas de fléchissement. Et même lorsqu'il doute de Dieu, il se met en colère contre lui. Il ne subit pas les évènements, mais les anticipe, les organise.

 

Dans les 10 commandements, Yul Brunner et Charlton Heston faisaient jeu égal dans l'interprétation et tenaient le film sur leurs épaules. Dans Exodus, le déséquilbre est trop important pour que cet aspect soit réussi. C'est bien dommage, mais ce point prive le film des 5 étoiles SOI.

 

Pourtant, en dédiant le film à son frère Tony, Ridley Scott avait bien en tête de filmer non pas l'affrontement de deux hommes, mais l'éloignement de deux frères que leurs fonctions obligeaient à ne plus vivre comme tel. Après tout, Hollywood les a souvent opposé, construisant une fausse rivalité à coup de box office. Ne disait-on pas dans les années 90, quand Ridley connaissait échec sur échec, que Tony lui avait ravi son sceptre ?

 

Mais comme l'alchimie ne fonctionne pas à plein, la rivalité arrivant trop tôt dans le film, l'aspect fraternel est finalement trop timoré.

 

On peut aussi regretter l'emploi trop fugace de Sigourney Weaver. Alors qu'il l'avait magistralement utilisée en second rôle dans 1492 (je mets bien sûr Alien de côté), Scott ne se sert de son actrice qu'avec une parcimonie quelque peu pingre. Peut être qu'une future version longue permettra de mieux apprécier son jeu toujours aussi délicieux, d'autant que son rôle est très loin d'être sympathique.

 

Cette (importante) réserve posée, on ne peut dénier au film une ambition exceptionnelle ! Scott ne se contente pas de faire son 10 commandements, mais donne un souffle nouveau à cette histoire, plonge le spectateur dans le doute et dans le questionnement. En ces temps de guerres religieuses mondiales, peut-on accepter sans broncher un Dieu qui sacrifie tous les premiers nés d'Egypte et ce pour se venger de 400 années d'esclavage ? Une des meilleures scènes du film est celle où Moïse se voit littéralement taillé en pièce par l'enfant représentant Dieu, ce dernier hurlant "400 ans d'esclavage, n'est-ce pas asez ?". Comme souvent, le réalisateur anglais ne cherche pas à servir un plat fade à son public. Il l'emmène dans des lieux où le spectateur ne sera pas forcément à l'aise. Il se refuse à aborder un univers en noir et blanc.

 

Certaines critiques ont haussé le ton en voyant le script tenter d'expliquer les plaies d'Egypte ou l'ouverture de la Mer rouge. Pourtant, Scott ne fait que reprendre le travail des historiens qui tentent depuis longtemps de concilier les écrits de la Bible avec la réalité historique. Les 10 commandements ou Le prince d'Egypte étaient des films religieux, Exodus est un film historique s'inspirant d'une histoire religieuse. C'est peut être cet aspect qui apparait choquant au premier abord. Alors que Noé n'hésitait pas à illustrer de manière rigoureuse l'Ancien Testament, Exodus ose prendre des libertés, soulever des hypothèses, aller au-delà des certitudes et des clichés et ne cherche jamais à caresser le spectateur dans le sens du poil.

 

Oui, il y a des scènes spectaculaires, mais ce sont bien les affrontements verbaux, les regards, les doutes des personnages qui sont le plus important.

 

Au final, Exodus rate de peu l'étiquette, quelque peu galvaudée, de chef d'oeuvre. Mais il s'affirme sans aucun soucis comme l'un des derniers grands chocs de 2014. Et à n'en pas douter, comme Kingdom of Heaven en 2005, il ne pourra que se bonifier avec le temps. Quand le spectateur aura digéré l'énorme masse d'information du film et accepté qu'une histoire ultra connue puisse être racontée d'une manière différente.

 

Et rien que pour les questions qu'il devrait soulever à tous, croyant ou non croyant, Exodus est un film essentiel. 

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La côte

***** Chef d'oeuvre !!

**** Très bon, allez y vite !!

*** 1/2 * Entre le bon et très bon, quoi...

*** Un bon film

** Moyen, attendez la vidéo

* Comment ai-je pu aller voir ça ??

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