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7 novembre 2015 6 07 /11 /novembre /2015 12:00
Ennemi d'état (****)

Le pitch : ayant récupéré par hasard un document impliquant un membre de la NSA dans le meurtre d’un sénateur, un avocat va se trouver plonger dans un monde où la surveillance est omniprésente.

 

Revoir l’un des meilleurs films de Tony Scott plus de 15 ans après sa sortie montre combien le cinéma peut anticiper sur notre futur là où ne l’attend pas. Car, si en 1999, le monde d’avant le 11 septembre n’était pas aussi paranoïaque que le notre, il n’en n’avait pas moins semé quelques graines concernant les menaces sur les libertés individuelles.

 

En effet, dans Ennemi d’Etat, les « méchants »  (excellent John Voight) travaillent sous pavillon gouvernemental et sont persuadés de leur droit, à savoir surveiller tout le monde au cas où un futur terroriste se trouverait dans cette nasse. C’est tout à fait la doctrine des années Clinton, avec la mise en place du programme Echelon, que l’on qualifia de Grandes oreilles de l’Amérique, à savoir une surveillance des télécommunications, des emails, des échanges entre particulier, société, nation. Malheureusement, cette débauche technologique ne permit pas d’éviter le 11 septembre. Ou plutôt, les renseignements trouvés qui auraient pu éviter ce drame ne furent pas mis en lien les uns avec les autres.  

 

Tony Scott filme donc, avec son efficacité habituelle, un monde où les agences gouvernementales espionnent ses con-concitoyens sans aucune vergogne. Mais ce n’est pas assez pour l’un des chefs de la NSA. Il lui en fait plus , un contrôle encore plus serré, une surveillance plus accrue. Et si le script ne prétend pas partir dans une direction style « Les dossiers de l’écran », il aborde tout de même les différents points de vue : Will Smith est au départ indifférent, ne voyant pas le mal à être écouté vu « qu’il n’a pas l’intention de poser des bombes », sa femme est totalement opposée et y voit un procédé fasciste, tout comme le sénateur assassiné au début du film (pour lui, c’est la liberté qui est menacée) alors que le patron de la NSA et ses employés y voient un rempart indispensable contre  tous les ennemis de l’Amérique.

Comme souvent, le héros va vite changer d’avis. Quand sa vie tournera au cauchemar, que ses secrets seront exposés en place publique et que le piège commencera à se reformer, il va comprendre que la vie privée vaut le coup d’être protégée et que rapidement, on peut devenir un coupable. Ironiquement, sa femme qui refusait tout contrôle acceptera très rapidement toutes les accusations de la presse.

 

La première partie du film met donc en place les différents évènements qui, mal interprétés par la NSA, vont fournir une base idéal pour accuser Smith. Ces éléments permettront également la conclusion du film, le scénario étant suffisamment diabolique pour prendre des faits entrevus au début de l’histoire et qui, à priori, n’ont pas de rapport avec, et les ressortir à la fin. Ainsi les rapports de Smith avec la mafia, sources de ses ennuis avec la NSA, seront sa planche de salut.

 

Mais c’est dans sa 2e partie que l’histoire devient encore plus passionnante avec l’arrivée de Gene Hackman. Il est d'ailleurs amusant de voir que dans l'un de ses premiers films, Conversations secrètes, il jouait un spécialiste des écoutes. Une référence qui n'a sans doute pas échappé à Tony Scott. Son arrivée dans le film est d’ailleurs très furtive, une brève apparition en voiture. Hakcman interprète la classique figure de l’initiateur qui va permettre à Smith de survivre dans un monde qu’il ne connait pas. Ancien espion, Hackman a quitté cet univers en en connaissant tous les secrets. L’action devient plus spectaculaire, les enjeux plus grands et la toile d’araignée tissée autour de Smith se desserre peu à peu, jusqu’à la conclusion finale.

 

Tony Scott a , comme son frère, un talent inné pour aborder efficacement ses sujets. Et même s’il n’a réalisé que des films contemporains, laissant à son aîné le loisir d’explorer le passé et le futur, il connait parfaitement sa grammaire cinématographique. Ici, il se sert de séquences très brèves , mais toujours lisibles et utilise à merveille toutes les possibilités d’images présentes dans  nos sociétés : caméras de surveillance, écrans informatiques et autres, les intégrant à sa narration et à sa façon de filmer. Le résultat ? couplé à un montage nerveux, les 120 minutes et quelques passent comme un éclair et cette plongée. Tony Scott aura été un réalisateur sous-estimé, mais si les critiques pouvaient se poser au moins sur ce film, il verrait qu’au delà du « faiseur de série B », on a un véritable auteur , un cinéaste majeur dont le seul « crime » fut peut être d’avoir eu un frère qui l’était encore plus.

 

Ironiquement, Ennemis d’Etat , film condamnant une certaine technologie, sera le dernier long métrage à sortir en Laserdisc Pal en France. Tué par le DVD, ce merveilleux support signait ici un chant du cygne exceptionnelle , avec une qualité d’image et de son époustouflante. C’est d’ailleurs à partir des 3 faces de mon LD que je rédige cette chronique.

 

En conclusion, Ennemis d’Etat est clairement un des sommets de la filmographie de Tony Scott, à ranger aux côtés des Prédateurs, du Dernier samaritain, USS Alabama ou de Déjà Vu. Il serait d’ailleurs temps que les historiens du cinéma se penche enfin et sérieusement sur son travail. Puisse cette modeste chronique être un point de départ !

 

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La côte

***** Chef d'oeuvre !!

**** Très bon, allez y vite !!

*** 1/2 * Entre le bon et très bon, quoi...

*** Un bon film

** Moyen, attendez la vidéo

* Comment ai-je pu aller voir ça ??

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