Le pitch : alors qu'Isla Nubar s'apprête à subir une éruption dévastatrice , Claire et Owen sont chargé par l'un des propriétaires du Parc d'évacuer le maximum de dinosaures. Mais, cette louable intention cache en fait un plan diabolique qui pourrait mettre en péril l'équilibre de la planète.
Attention : cette chronique contient des spoliers.
Après un 4e épisode mi reboot/mi séquelle qui avait remis la saga sur des rails 14 ans après le 3e film, Jurassic World : fallen Kingdom embarque donc les spectateurs dans une toute nouvelle direction, la saga quittant enfin l'île (si ce n'est ce bref passage à San Diego dans Le monde perdu) pour arriver sur la terre ferme. Et c'est vraiment une bouffée d'air frais dans cette nouvelle trilogie.
A Colin Tremorrow succède donc Juan Antonio Bayona, auteur des très remarqués (et remarquables) L'orphelinat et Quelques minutes après minuit. Le cinéaste est un fan de Spielberg et il est évident qu'il a voulu à la fois rendre hommage au maître (sa partie la plus sombre) et continuer à creuser le sillon de terreur qu'instillait par moment les premiers épisodes.
Le film est clairement divisée en 3 parties. Le premier acte rappelle quelque peu Le monde perdu avec une expédition de sauvetage qui cache en fait un vol de dinosaure. Bien rythmée, ne perdant pas de temps avec des préliminaires et alignant quelques scènes chocs, notamment l'apparition du Plésiosaure et surtout la chute délirante des héros dans une gyrosphère le long de la falaise et se terminant dans la mer. Avec l'éruption en marche, les dinosaures qui cherchent également à fuir et l'île tremblant sur ses fondations, on atteint un climax jamais vu dans un Jurassic Park. Et quand cette partie se termine, l'agonie d'un brachiosaure dans la fumée de l'éruption prend aux tripes. Le film n'en n'est pas encore à la moitié que Bayona a déjà réussi son pari.
Cependant, on est en terrain connu : la jungle, les dinosaures agressifs, le T-Rex qui sauve les héros... Le réalisateur connait et maîtrise son sujet. Il s'offre même un remake de la scène où les héros découvrent un brachiosaure , copie idéalisée et améliorée de la scène culte de Jurassic Park.
Mais dans la 2e partie, assez courte, où l'on comprend enfin les raisons des "méchants" et surtout une 3e partie qui se transforme en un véritable film d'épouvante (ce plan où la griffe de l'indoraptor s'approche de la fillette !!!) que Fallen Kingdom déploie toute sa splendeur. En intégrant les sauriens dans le monde des hommes, notamment dans une chambre d'enfant, Bayona modifie totalement l'imagerie du film. On pense souvent à Alien d'ailleurs, avec une partie de cache-cache mortelle où les seconds rôles et les figurants passent de vie à trépas, sans aucun égard pour leur statut.
Techniquement, le film est parfait ! La révolution engagée par Jurassic Park il y a 25 ans est totalement mature, même si les effets numériques ont encore gagné en réalisme, avec de nouvelles sous-couches de muscles (voir le reportage dans le dernier SFX ou le numéro de l'Ecran fantastique de juin) qui permettent aux animaux 3D de flirter avec la réalité.
Et même si les effets animatroniques ont été mis en avant par la production, notamment dans la 2e partie , quand les héros "soignent" Blue, le raptor vedette, et transfusent du sang d'un T-Rex, il est évident que ce sont surtout les dinosaures virtuelles qui font le spectacle.
Alors, évidemment, on peut s'agacer de quelques facilités scénaristiques (franchement, on voit dès le départ le double jeu du méchant financier, ne serait que par cette phrase "j'étais jeune et idéaliste" à l'adresse de Claire), de la révélation de la "naissance" de la petite fille (même si je pensais qu'elle était la fille de la gamine présente dans Jurassic Park, ce qui était une erreur vu qu'elle était la petite fille de John Hammond) ou de la trop grande facilité à l'indoraptor de se promener dans un manoir à l'anglaise.
Mais comme souvent , la forme l'emporte sur le fond, même si Bayona joue à fond la carte d'un scénario diabolique, et on est emporté par le tourbillon de ce 3e acte, sans finalement chercher à regarder les incohérences inhérentes à ce type de film.
Cependant, la scène la plus culottée du film est celle où la fillette va faire basculer le destin de la planète en libérant les dinosaures car "ils sont comme moi". La scène post-générique qui voit des ptéranodons se poser sur la fausse tour Eiffel de Las Vegas donne alors le ton du 3e film, accentué par les paroles de Jeff Goldblum en star de luxe estimant que désormais l'homme doit partager la planète avec une espèce qu'il a recréé !
Fallen Kingdom continue donc brillamment la saga , empruntant donc des chemins jamais vus encore, anticipant des fantasmes entretenus depuis des années - pendant un temps, il fut question que la saga fasse un bond dans le futur, avec un monde dévasté par les dinosaures - et promettant un final dantesque ! Il fallait de toutes façons cette prise de risque , que le film va payer quelque peu au box office (les 1,6 milliard du premier ne seront pas atteints) , pour relancer totalement une série de films qui n'a jamais, je le répète, céder à la médiocrité, mais qui restait dans un univers connu.
Vivement 2021 !