Le pitch : Passager dans le célèbre train, Hercule Poirot doit enquêter sur le meurtre d'un passager alors que le convoi est bloqué par la neige. Problème : la victime n'était pas un saint et chaque passager à sa propre raison de le détester.
Réalisé avec un grand luxe de moyen et une pléiade de stars par Kenneth Branagh (qui s'est octroyé le rôle principal), Le crime de l'Orient Express est un régal pour tout amateur de film policier à "l'ancienne". Point de grosses scènes d'action, de climax ou de bons mots style buddy movie ici, mais un respect du texte d'Agatha Christie, une succession de fausses pistes et la fameuse révélation finale (que l'on voit cependant venir assez rapidement, surtout quand on a lu le livre dans son adolescence) et qui remet en question tout ce que l'on a vu avant.
Une partie de la critique s'est focalisée sur le cabotinage du casting. Il est vrai que Johnny Depp, Penelope Cruz, Willem Dafoe, Judi Bench, Michelle Pfeiffer ou Daisy Ridley (pour ne citer qu'eux) cherchent à tirer la couverture à eux à chacune de leurs scènes. Mais c'est oublier que Branagh vient du théâtre et qu'il adore justement les films chorales et que, ce faisant, il préfère offrir à chacun de ses acteurs "son" moment de gloire dans un métrage où la multiplication des personnages, des points de vue, des flashbacks empêchent tout mise en avant unique. Le héros, c'est Hercule Poirot, le reste du casting n'est là que pour faire briller ses implacables analyses et son esprit de déduction impitoyable.
Une fois cette critique injuste évacuée, le film est incroyablement plaisant à regarder. D'une part, Branagh (qui ne l'oublions pas avait enchainé Thor puis The Ryan initiative, se frottant donc à de très gros budgets) ne filme jamais en style "théâtre à l'écran". Ses angles de caméras sont audacieux et il n'abuse pas de champ/contre champ dans les dialogues. Bien au contraire, il conçoit chaque interrogatoire comme un duel intense et magnifie le texte en dynamisant la mise en scène. De ce fait, le côté "mitraillette" que l'on cherche dans les gros films d'actions se trouve donc dans les dialogues. Un risque payant qui permet de suivre le film sans aucun temps morts, alors qu'il ne se passe en fait rien : une quinzaine de personnes enfermés dans un train avec un enquêteur qui cherche à savoir la vérité.
Le luxe des décors, les costumes, la reconstitution des années folles, le travail sur le train (extraordinaire) élèvent également le film. On est loin d'un téléfilm ou de la précédente version avec Albert Finney (avec le recul, cette version de Sidney Lumet parait plutôt cheap). Branagh a eu les moyens pour faire un gros film et ne s'en est pas privé. le public a répondu massivement présent, preuve qu'il est donc possible de proposer autre chose que des courses poursuites ou des fusillades toutes les 5 minutes.
Et un bonheur n'arrivant jamais seul, les phrases finales, parlant d'un accident arrivé sur le Nil ont été confirmées avec la mise en chantier d'un deuxième opus d'Hercule Poirot version Branagh : Meurtre sur le Nil qui sortira l'année prochaine. On a hâte !