Le dernier film en date de Guillermo del Toro (Blade II, Hellboy, L'échine du diable, Mimic) vient de sortir dans une superbe édition 5 disques (3 DVD + 1 DVD HD + le CD
de la BOF) et un livret de 64 pages, le tout dans un superbe fourreau.
Ecrin idéal pour la première chronique DVD de SOI - le Blog !!
Voici donc la première partie qui va s'intéresser au film lui même. Les chroniques des autres disques suivront la semaine prochaine.
Le film raconte deux histoires en parallèle : la première suit le quotidien de Vidal, un capitaine de l'armée de Franco , en Espagne, après la guerre civile. Celui ci traque sans relache les
derniers Républicains qui se cachent dans les montagnes.
La deuxième suit Ofélia, la fille adoptive de ce dernier qui va découvrir qu'elle est en fait la princesse d'un monde souterrain et qui, avec l'aide d'un faune , va devoir affronter de
redoutables épreuves , pour revenir dans ce monde. Mais est-ce un rêve ou une réalité ?
On le voit, Guillermo del Toro n'a pas choisi la facilité pour un projet qu'il chérit depuis 20 ans. Les deux histoires s'entremêlent plus que ce résumé ne le laisse à penser mais sans
vraiment se rejoindre (sauf à la toute fin, et encore). Il plante sa caméra dans une Espagne franquiste en proie à la violence et à la répression tout en faisant évoluer sa jeune héroïne dans de
superbes décors du monde souterrain. L'emploi du fantastique, somme toute réduit, permet donc d'opposer le monde des adultes, fait de trahison, de meurtre et de guerre, à celui des enfants, plus
axé sur la magie, la féérie et la ruse.
Ophélia va vite découvrir que sa mère, enceinte d'un petit garçon, a fait le pire choix en rejoignant son nouveau mari, Vidal et que ce dernier ne s'intéresse qu'à la survivance de son nom.
Commettant les pires atrocités , il ne se soucie pas du bien être de sa femme ou d'Ofélia. Et c'est cette brutalité ainsi que la soumission de sa mère à cet homme qui va propulser l'enfant dans
le labyrinthe (du faune, comme le montre le titre original El Laberinto del Fauno).
Del Toro a non seulement réalisé mais signé le scénario et fait la photographie du film. De ce fait, l'unité est parfaite. Mais si le film est une réussite majeure et sa sélection à Cannes prouve
que , quand il le veut, le festival peut s'ouvrir à un véritable cinéma, il comporte deux défauts qui en gâchent un peu le visionnage.
Le premier réside en une répartition trop schématique des caractères. Ainsi, Vidal est un odieux franquiste qui torture, assassine, brutalise, méprise... Les Républicains sont montrés comme des
gens nobles , courageux, honnêtes. La réalité fut bien plus complexe. Comme tentent de l'expliquer des historiens espagnols nés après la guerre (donc débarassés de toute idéologie), la guerre
civile est née du refus des Républicains d'accepter le verdict des urnes du 3 décembre 1933 qui donnèrent la victoire à la droite. Mais surtout, que les atrocités furent une constance des deux
côtés. Les chiffres bruts sont les suivants : la guerre a fait 60 000 victimes de repression dans la zone du Frente Popular et 50 000 dans la zone tenue par Franco. C'est après la guerre
que la balance s'inverse avec l'execution de 30 000 personnes par les Franquistes. Le film montre l'alliance classique entre l'Eglise et le pouvoir franquiste, alliance réelle et
indiscutable. Mais sait-on que les Républicains ont, durant la guerre, massacré plus de 20 000 religieux, prêtres, nonnes...
(Je vous renvoie au dossier La nouvelle Revue d'Histoire de juillet-août 2006 qui reprend tous les nouveaux ajouts de l'historiographie à ce sujet)
Comme dans tout drame humain, la réalité est plus complexe qu'un simple scénario. Guillermo del Toro a cependant l'immense honnêteté de ne pas faire des franquistes des pantins grandiloquents.
L'interprétation de Sergio Lopez dans le rôle d'un Vidal bien conscient de sa propre monstruosité montre également un refus du manichéisme.
L'autre soucis du film réside dans son emploi un peu chiche du fantastique. Ne vous attendez pas à un déluge de créatures fantasmagoriques, Del Toro étant resté finalement sobre sur ce point.
Mais au final, le fantastique est loin d'être la majorité du métrage. Le réalisateur semble être plus intéressé par l'histoire classique de la lutte entre résistants et oppresseurs, histoire
d'ailleurs fort bien réalisée, pleine de rebondissement et admirablement bien jouée. Le film est alors dans un réalisme total et les combats évitent les clichés du genre. Les coups de feu sont
chétifs, les corps ne volent pas en l'air...
De ce fait, on s'éloigne
parfois un peu trop longtemps d'Ofélia et de son royaume. Une écriture plus parallèle aurait sans doute mieux permis de cerner les enjeux du film et ce n'est que dans son dernier acte que les
intrigues se rejoignent vraiment. En fait, et c'est sans doute pour cela que Le Labyrinthe de Pan a tant brillé dans les festivals internationaux , ce fantastique diffus a permis aux critiques de
s'encanailler sans plonger dans un pur film de Fantasy.
Ceci est d'ailleurs surprenant quand on voit les délires graphiques d'Hellboy (que je trouve très surestimé) et de Blade II (nettement plus convaincant à mes yeux).
Mais ces deux "défauts" (qui n'en sont pas vraiment, plutôt des points de vue différents du mien) ne sauraient cacher une mise en scène impressionnante. Del Toro se sert , par exemple, du tronc
des arbres pour passer d'un plan à un autre. Il multiplie les points de vue sur une même scène (Vidal se rasant) en usant du même procédé (en se servant des poteaux de soutenement de la maison).
Sobre et efficace à la fois, le montage laisse au spectateur le temps d'imaginer tout en mettant en pleine lumière de fantastiques créatures comme le faune ou l'ogre (qui a ses yeux dans ses
mains).
Les images sont superbes , amplifiées par des décors sompteusement éclairés et magnifiés par de lents mouvements de caméra. On sent que le film est l'aboutissement du travail hollywoodien du
réalisateur qui a su apprivoiser, métrage après métrage, son métier de metteur en scène.
Enfin, Guillermo del Toro a su tirer le meilleur de l'interprétation d'Ivana Baquero qui campe une fantastique Ofélia. Tout le film d'ailleurs est une ôde à la féminité. Si les hommes sont des
lâches, des brutes ou des ombres, les femmes , quelque soit leur âge, représentent ici le courage, la vaillance mais aussi la maternité, la douceur , la protection. Il est clair que del Toro a
choisi son camp.
Au final , malgré les quelques réserves (que certains balaieront d'un revers de main), Le Labyrinthe de Pan est une réussite , un exemple parfait de ce que le fantastique peut apporter au cinéma
d'auteur.
(Rappelons que le film a rapporté 81 millions de dollars sur toute la planète pour son interprétation salle dont 37 aux USA , devenant ainsi le 4eme film en VOST du Box Office US. A comparer avec
les 2,4 millions de dollars récoltés en France. Qui a dit qu'il n'y avait pas de cinéphiles en Amérique)
hé bien disons que c'est Ofélia quand je pense en Espagnoi et Ophélia quand je pense en français !!<br />
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Bon, ce n'est pas très malin comme réponse. Cela m'apprendra à me relire !!<br />
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Merci d'avoir pointé cette erreur.
j'ai une question , finalement la gamine c'est Ophélia ou Ofélia parce que l'écrire de deux manières différentes à quelques lignes de différences dans un si bon article ça fait vraiment tache