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29 mai 2008 4 29 /05 /mai /2008 07:04

Le pitch : suite aux meurtres d'athlètes israéliens lors des jeux olympiques de Munich par l'organisation palestinienne Septembre Noir, le Premier ministre de l'état hébreu, Golda Meir, décide de l'opération Colère de Dieu. Elle consiste à traquer et à tuer les responsables du carnage. Munich va alors suivre le parcours sanglant des agents du Mossad.

 

Munich a une énorme qualité qui excuse ses défauts : son refus du manichéisme. Passons sur l'interprétation sans faille (Eric Bana y est stupéfiant !!) et sur la qualité, somme toute normale, chez le réalisateur du film et intéressons nous à la vision du monde qu'il nous offre.

 

De Spielberg, on connaît le versant historique : La couleur Pourpre, La liste de Schindler, Amistad, Empire du soleil, Il faut sauver le soldat Ryan et même Arrête moi si tu peux. Mais dans tous ces films, avec une exception particulière pour Ryan, les deux camps étaient relativement bien identifiés. L'échec d'un film comme Amistad tenait, par exemple, dans son traitement bien trop brutal des personnages. D'un côté les gentils esclaves luttant pour leur liberté aidés par de sympathiques yankees abolitionnistes et de l'autre, des salopards vendeurs d'hommes. Remarquez, il aurait été dur de faire le contraire, mais le film aurait gagné en subtilité. Reste à savoir comment le traitement aurait pu être différent. De plus, Amistad avait une valeur pédagogique : faire connaître aux jeunes générations le drame de l'esclavage en y incluant tous ses thèmes : le commerce triangulaire, la responsabilité des tribus qui vendaient leurs prisonniers, la rapacité des Européens, le cynisme des américains vis-à-vis du bois d'ébène...

 

Disons le tout de suite, à l'annonce du projet Munich , j'espérais un film manichéen car , drapé dans mes certitudes , je ne peux pas imaginer des terroristes autrement que comme des fils de chien sans scrupule . Pour moi, un intégriste, quel qu'il soit, qui se fait sauter dans une foule de civils vaut moins que la bave qui souille la gueule de mes chats. Mourir au nom d'un dieu  dans le seul but d'accéder à un paradis de jouissance me dépasse. Pour Munich, je voyais donc déjà des agents du Mossad courageux abattre des terroristes palestiniens sanguinaires. En clair, Munich était, dans mon esprit, Rambo IV en terre sainte.

 

Spielberg est donc allé de l'autre côté et il a osé montrer que l'homme peut être capable du pire. Il l'avait fait dans Schindler mais sur cette cause, à part quelques révisionnistes et négationnistes, peu de monde pouvait contester les faits que le grand réalisateur nous lançait à la figure. Ici, il ne prend personne dans le sens du poil, bien au contraire. Le massacre de Munich sert de prétexte à une traque impitoyable et par une science de la mise en scène et un talent de raconteur hors du commun, Spielberg parvient à inverser notre sentiment. Au départ, on espère voir des James Bond casser du terroriste, jubiler comme lors d'un True Lies et on en arrive à éprouver la souffrance des membres de septembre noir. Sans pour autant les plaindre.

 

Munich montre combien  la vengeance est amère quand elle n'est pas faite avec la justice à ses côtés. Et là aussi, il va à l'encontre de nos idées reçues. Soyons honnêtes, combien d'entre nous n'a jamais dit "il faudrait rétablir la peine de mort pour untel ou untel" à l'évocation de quelques crimes crapuleux et honteux

 

Le rejet qu'a pu engendre Munich chez certains, y compris dans la communauté juive, peut alors s'expliquer. En humanisant ses terroristes et en instillant le doute chez les agents du Mossad (alors que les vrais acteurs de ce drame n'ont jamais rien regretté, si l'on en croit leurs déclarations), Spielberg s'écarte de la sacro-sainte vérité et se lance alors en pleine fiction. Il transforme un fait-divers tragique en un thriller haletant, ultra-documenté (le film jurerait avoir été filmé dans les 70's) et ne s'embarrasse pas de subtilités. On se rappelle alors que tonton Steven n'est pas seulement l'un des plus grands réalisateurs de l'histoire, c'est aussi l'un des plus efficaces. Débarrassé d'un carcan moral, il se livre alors à une extraordinaire plongée dans les méandres de l'âme humaine. Le meurtre pour venger le meurtre, la violence pour exorciser la violence et au final, quoi ?

 

De personnes que je respecte se sont élevées contre le film (je pense à Guy Millière, entre autres) et y ont vu une source du mal. Pour ma part, Munich est une oeuvre de rédemption qui aura fait chanceler mes idées reçues l'espace d'un moment. Mais je comprends que l'on puisse détester le film, que on puisse le haïr. Peut-être parce que je ne suis pas impliqué, parce que je n'ai pas connu les attentats suicides. Peut-on en vouloir à ceux qui refusent de tendre la main à ceux qu'ils voient comme des meurtriers. Et la récente victoire du Hamas est peut-être là pour nous montrer que la démocratie n'est jamais acquise.

 

Mais, dès que j'ai pu voir de nouveau, ces civils irakiens, mes frères, massacrer par les bombes de Zarquaoui, alors de nouveau revient le spectateur lambda qui espérait un Rambo IV. Mais dans un coin de mon esprit, Munich restera une autre vision, une voix qui me dit que la vengeance ne règle pas forcément grand chose. Pas facile de se poser de telles questions.

 

Le courage de Spielberg est, une fois de plus, d'avoir été là où on ne lui demandait pas d'aller. Grâce lui soit rendue pour avoir osé ébranler nos convictions. Mais c'est aussi le courage d'avoir osé montrer la naissance du terrorisme moderne. Car Septembre noir est la matrice du 11 septembre, la naissance d'un terrorisme médiatique qui reprend les expérimentations des nazis sur le pouvoir de la télévision et des médias. En abordant de front cet aspect, et en ne l'édulcorant pas, Munich fait aussi oeuvre de mémoire.

Puis en insistant sur les doutes, les erreurs, il fait oeuvre alors de pédagogie sanglante : pour autant que l'on pense légitime Colère de Dieu, comment ne pas se dire que, au final, on en revient à cette vieille loi du Talion, banni du nouveau testament mais, hélas, remis au goût du jour par Mahomet qui massacra sans frémir la dernière tribu juive de Médine   , les Banou Quoraïza.

 

Munich est donc un film complexe, âpre, à l'accès difficile et dont il est bien ardu de se débarrasser une fois vu. Bref, il n'est pas ce que j'attendais. Et c'est tant mieux.

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commentaires

F
Beaucoup aimé également, mais Spielberg m'a un peu dérouter sur ce film. Je pensais pas qu'il pouvait filmer des scènes de fusillades aussi sanglantes. Autrement, très bon film.
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C
j'ai beaucoup aimé ce film, que j'ai trouvé intelligent et fin.
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  • Enseignant, fan de cinéma et de métal, chanteur dans différents groupe de métal, collectionneur de tout ce qui touche à Star Wars... what else ?
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La côte

***** Chef d'oeuvre !!

**** Très bon, allez y vite !!

*** 1/2 * Entre le bon et très bon, quoi...

*** Un bon film

** Moyen, attendez la vidéo

* Comment ai-je pu aller voir ça ??

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