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26 août 2008 2 26 /08 /août /2008 07:39
Le pitch : le gardien d'une résidence de Philadelphie découvre une "nymphe" dans la piscine. L'étrange jeune femme est en mission. Mais laquelle ? A lui de le découvrir.

Les visiteurs de SOI savent que j'ai un faible pour M.Night Shyamalan. Tous ces films, y compris Le Village , m'inspirent et certains ont même été des repères spirituelles pour moi. D'où un sentiment parfois mitigé à la vision de La jeune fille de l'eau, le cinéaste indo-américain ayant visiblement mal encaissé le clash avec Buena Vista.

Attention, je dis parfois. Car le film peut tour à tour vous émerveiller (la mise en scène est absolument époustouflante, d'une grande douceur et la direction d'acteur donne le vertige tant elle est maîtrisée) puis vous irriter (certains scènes sont incongrues et quelques personnages sont indignes du maître).

Commençons par le négatif . Le film commence par un petit cartoon bien trop explicatif. Est ce une volonté de la Warner , sans doute désorientée par le métrage , de vouloir tout expliquer ? Toujours est-il qu'une énorme partie de l'intrigue est ainsi déflorée. Les surprises n'en sont donc plus, bien au contraire, et le film perd tout son suspens !! Un comble pour un cinéaste qui a bâti sa carrière sur des scripts hors pairs et bourrés de surprises !!

Autre source d'agacement (mais aussi de réjouissance, ce qui être paradoxal), le recours à un conte qui permet de faire avancer le héros. Que cet argument narratif soit utilisé une fois (quand le héros demande à une des locataires si elle connaît un des mots qu'a prononcé la nymphe , par exemple) , passe encore. Mais ce gymnick est utilisé plusieurs fois dans le film. Qu'est ce qui aurait empêché le gardien de faire ses propres recherches, découvrant alors par lui même la vérité ? Mais si l'on considère que le film est une réflexion sur le mythe, alors il devient logique que ce soit par le biais de la parole , qui plus est traduite, que l'histoire avance.

Enfin, certains personnages sont inaboutis. Même le traumatisme du héros n'est pas exploité de manière optimale. Le pompon revient à un critique de cinéma (?) que Shyamalan expédie dans une scène , certes très bien écrite , mais hors de propos. On a d'ailleurs l'impression que le cinéaste se venge. A brasser trop de résidents, Shyamalan prend le risque d'en effleurer. Et tombe parfois dans le trop juste, tout en évitant le cliché. Pas de bimbo, pas de fier à bras mais une galerie attachante de personnages qu'on ne voit rarement dans des films : une maman chinoise , un bodybuiler un peu neuneu, une équipe de jeunes grassouillettes, un écrivain en devenir qui vit avec sa soeur... une galerie peu typée, et qui aurait gagné à être plus étoffée.

Mais ces points négatifs ne résistent pas à ceux positifs du film . La jeune fille de l'eau a pour lui un scénario original qui n'est ni une séquelle, ni une adaptation. Shyamalan s'est sans doute inspiré d'un conte (mais lequel) ? ou de plusieurs pour nous offrir une relecture de la fantasy. Après avoir exploré la peur dans Signs puis la manipulation dans Le village, le cinéaste s'interesse à la construction d'un mythe. Son script est incroyablement abouti et ce , malgré les facilités citées plus hauts.

De plus, à la manière d'un McTierman, Shyamalan ose interroger sa propre vision du cinéma et casser le mythe de la progression du récit. Ici, ce sont les acteurs qui font avancer l'histoire et non des péripéties quelconques. On sent d'ailleurs un immense respect dans la légende racontée par la maman chinoise. Et cette maman, c'est tout simplement le scénariste expliquant à un réalisateur où il veut en venir. La subtilité de la chose peut parfois être trop soulignée mais il est clair que La jeune fille de l'eau n'est pas qu'un essai sur le mythe.

Certes, on peut parfois se demander où il veut en venir : film d'épouvante ? conte de fée ? satire sociale ? Sans doute tout cela à la fois. Mais cela serait aussi mettre de côté la puissance comique du film. Car La jeune fille de l'eau recèle plusieurs scènes de pure comédie, souvent impeccablement réussies et d'une grande rigueur niveau mise en scène . Pas de gags idiots mais l'irruption du fantastique dans des vies mornes tire irrésistiblement vers le côté drôle des individus obligés de faire ce qu'ils n'ont pas l'habitude de faire. c'est sans doute ce mélange des genres qui met mal à l'aise une partie du (maigre) public. On a vraiment affaire à un OVNI, un film n'obéissant à aucune règle, bien au contraire. Shymalan n'est toujours pas dans le moule d'Hollywood et ses budgets restent raisonnable. On peut même dire qu'il reste un des derniers auteurs d'arts et d'essai de Los Angeles à oser voir les choses en grand.

Il est aidé par des acteurs franchement étonnant. Passons rapidement sur  Bryce Dallas Howard, dont le rôle quasi-muet permet de tout faire passer par son étrange regard. Sa beauté (à peine voilée par une pudique chemise) illumine également toutes les scènes où elle apparaît. Sa fragilité , enfin, bien loin des personnages stéréotypés que l'on voit dans les films actuels, démontre que l'icône féminine de la grande époque holywoodienne n'a pas dit son dernier mot. Ici , aucun effet de mode qui gangrène les films fantastique style femme forte et cie. La nymphe est et reste un personnage mystérieux, éthéré, fascinant.

Face à elle, Paul Giamatti joue à la perfection l'homme ordinaire confronté à l'extra-ordinaire. Shyamalan a su tirer de lui ce qu'il avait su tirer de Bruce Willis ou Mel Gibson. Mais son statut de non-star renforce encore l'identification. Giamatti est un homme normal, un spectateur lambda dans le film qui ne devient qu'acteur de l'histoire que par intermittence. Il cherche d'ailleurs sans arrêt à déléguer ses responsabilités aux autres.

Enfin, le réalisateur se met encore en scène et prouve qu'il a envie de jouer, que ce n'est pas un caprice de metteur en scène. Ce qui pouvait passer pour un clin d'oeil à Hitchcok (dont l'admiration que lui porte Shyamalan est bien connue) est en passe de devenir un vrai désir de jouer. Et comme il est aussi bon acteur que directeur de film....

Il ne faudrait pas que cet échec relatif ne détourne le réalisateur de son but  : faire des films intelligents et originaux dans un monde où la rentabilité à court terme est érigé en veau d'or.

La jeune fille de l'eau est un film déroutant, parfois décevant, souvent brillant, sans doute incompris. Une oeuvre que la vidéo devrait remettre à sa juste place et lui rendre sa juste valeur.
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commentaires

C
Pas son meilleur mais un agréable métrage...
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La côte

***** Chef d'oeuvre !!

**** Très bon, allez y vite !!

*** 1/2 * Entre le bon et très bon, quoi...

*** Un bon film

** Moyen, attendez la vidéo

* Comment ai-je pu aller voir ça ??

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