Il y a 3 ans , Bryan Singer réalisait l'une des meilleures adaptations ciné d'un Comics, se hissant sans problèmes au niveau du Superman de Donner et au Batman de Burton. A la surprise générale car Singer avait surtout travaillé sur de petites productions, le cinéaste parvenait à gérer un budget somme toute modeste mais surtout respectait à la lettre l'identité du comics qui consiste plus en une réflexion poussée sur la tolérance qu'une succession de baston. X-Men enBD est une succession de chef d'oeuvre. X-Men I en était un aussi.
3 ans plus tard, la donne a changé : plus de moyens (30 millions de dollars de plus), plus de fans (ceux qui n'avaient jamais lu le comics mais sont tombés amoureux des personnages), plus de pressions... On pouvait craindre que la Fox joue la surenchère imbécile, abrutisse le métrage d'effets visuels, de combats et abdique devant la volonté de quelques exécutifs pour qui le cinéma ne peut que rimer avec dollars. A la vision du film, les craintes sont définitivement envolées. X2 ridiculise totalement Spider-Man dans son exposition des personnages. Ici pas de dichotomie du type une heure pour présenter les persos de manière géniale puis une heure pour tout foutre en l'air avec des caricatures ridicules, des combats totalement surréalistes et surtout avec une démagogie qui étonne chez Sam Raimi . Non, ici, le ton donné dès la scène d'ouverture qui va aller croissant jusqu'à ce magnifique plan final qui voit le Phénix commencer à émerger des eaux du lac, rassurant les fans sur le destin de Jean Grey.
X2, comme son prédécesseur sera placé sous le signe du combat psychologique : Diablo qui se débat entre sa foi et sa volonté d'aider ses nouveaux amis. Magnéto, tiraillé entre son désir de sauver ses frères mutants et d'aider son ennemi Xavier. Xavier qui doit faire face à ses démons quand le général Stryker et Magnéto lui rappelle un de ces cruels échecs. Pyro, partagé entre l'enseignement pacifique de Xavier et l'ivresse que lui procure ses pouvoirs. Iceberg, anéanti par le rejet de sa famille. Malicia partagée entre son attirance pour Iceberg , qu'elle ne peut consommer sous peine de le tuer, et Wolverine. Wolverine obligé de faire le choix entre son ancien mentor , le général Stryker, et le mutant, quitte à faire une croix sur son passé. Jean Grey, qui apparaît réellement comme l'âme des X-Men et qui doit faire le choix le plus douloureux de son existence, sacrifiant son amour et .. Je n'en dis pas plus. Seul Mystique reste identique : son but et son amour pour Magnéto ne changent pas.
Et tous ces magnifiques personnages sont enchâssés dans une trame complexe qui voit Stryker se lancer dans la destruction de l'humanité mutante. De ce fait, Singer enchaîne les scènes d'anthologies : Diablo attaquant le président. Les troupes de Stryker se lançant à l'assaut du manoir de Xavier , ce qui nous vaut l'apparition de Colossus, Etincelle et Cyrène. (notez que Gambit apparaît aussi mais sous son nom civil, Rémi Lebeau , lorsque Mystique consulte les fichiers de Stryker). Wolverine repoussant ses mêmes troupes. Pyro étalant ses pouvoirs devant les forces de l'ordre. Xavier prisonnier de son conflit intérieur. Tornade et Jean repoussant les forces US. Magnéto reprogrammant Cérébro. Mystique s'introduisant dans la base de Stryker. Lady Deathstryke (extraordinaire) s'opposant à Wolverine. Bref, une succession de morceaux de bravoures mais qui ne phagocytent jamais le film. Car Singer aime ces personnages, offre à chacun la possibilité de briller, ne cesse de brouiller les pistes.
Alors oui, X2 n'est pas un film d'action pur et dur (quoique avec toutes les péripéties que je viens d'évoquer, sachant que j'en ai à peine dis le tiers.. Dire que certains estiment que le film est mou !!) mais un film d'auteur maquillé en film de super héros. X2 , c'est tout simplement l'apogée d'une idée de papier, réalisé par un homme qui restera comme celui qui a fait X-Men . Dans la main d'un spécialiste de l'action, on aurait eu droit à un déluge de cascade sans âme, à un déferlement d'effets spéciaux techniquement irréprochables mais nous éloignant toujours de l'histoire. Singer ne perd jamais l'histoire, l'histoire et encore l'histoire.
X2 est un chef d'oeuvre. Il restera au panthéon du 7eme art comme la quintessence absolue de l'image dessinée qui prend vie . Singer a tout compris aux X-Men. Ceux qui estiment qu'il fallait un cinéaste plus "couillu" ont tort . Tout simplement. Parole de fan absolu.