Le pitch : engagé par une chanteuse capricieuse, un garde du corps hyper pro, se sent petit à petit attiré par elle.
Le décès tragique de la sublime Whitney Houston appelait forcément à une chronique de cette superbe romance sortie il y a déjà 20 ans et qui connu un succès mondial largement justifé, avec 410 millions de dollars de recette à la clé et une 7e place aux USA, devant Basic Instinct !
Whitney ne s'aventura que deux fois dans le domaine cinématographique : avec Bodyguard en 1992 et 4 ans plus tard le sous-estimé Waiting to exhale, réalisé par Forrest Whitaker et où la diva partageait l'affiche avec Angela Basset (Strange Days, Tina, Contact). Mais cette première aventure fut un coup de maître.
Certes, en jouant une chanteuse, elle ne prenait pas grand risque. Mais combien de chanteurs se sont cassés les dents en essayant de reproduire leur succès vocal sur pellicule. Ici, Whitney ne joue effectivement pas, elle se contente d'être. Et quand on sait que sa vie, pourrie par l'alcool et la drogue, ne lui réserva pas la plénitude qu'elle espérait, on peut voir un parallèle très troublant entre la Rachel du film et sa vraie vie : capricieuse, hautaine, alcoolique mondaine mais surtout fragile et perdue, malgré tout son argent !
Magnifié par un excellent script de Lawrence Kasdan, le génial auteur de L'Empire contre Attaque ou Les aventuriers de l'arche perdue, sans compter son chef d'oeuvre absolue Wyatt Earp, la chanteuse évolue donc dans un monde artificiel et son seul point d'ancrage va se révéler être un homme austère, froid et voulant à tout prix maîtriser ses émotions. Kevin Costner était alors au top de sa gloire et l'avenir lui souriait également. Voir comment, 20 ans plus tard, Hollywood se passe d'un tel acteur, a de quoi laisser pantois. Bodyguard fut d'ailleurs son dernier film à dépasser la barre de 100 millions de dollars aux USA.
Le duo surfe donc sur la classique opposition entre deux êtres trop éloignés l'un de l'autre, mais c'est justement ce côté classique, voire prévisible, qui fait tout son charme au film. Mick Jackson joue d'ailleurs sur ce classicisme avec une mise en scène sobre, qui sait parfois s'emballer (dans la scène de la discothèque notamment), et qui reste toujours juste vis à vis ce son sujet. Il est aussi curieux de voir que Jackson ne réalisera aussi qu'un seul autre film, l'excellent Volcano en 1996 avant de disparaître de la circulation.
Bodyguard fut décrié à son époque, jugé sirupeux et uniquement porté par sa musique (le hit I always Loved you), ne démontrant que très peu l'envers du show buisness ! Un "journaliste" osa même écrire que Costner méritait l'Oscar de la pire coupe de cheveux (c'est dire à quel niveau le débat se situait). Mais 20 après, la magie opère toujours et le destin tragique de la star donne encore plus de force à ce film.
Oeuvre mineur ? Peut-être. Mais en attendant, rarement une telle fusion entre la musique et le cinéma, entre la vraie vie et la fiction, entre les coulisses et le devant de la scène, a été montrée sur un grand écran. Retrospectivement, Houston et Costner ne parvinrent plus jamais à retrouver un tel niveau et une telle communion avec le public. C'est peut être à cela que l'on reconnaît un grand film.