Le pitch : un jeune veuf décide de refaire sa vie en achetant un zoo.
Le cinéma de Cameron Crowe est un cinéma délicat et rare (6 films en 20 ans !) Nouveau départ ne déroge pas à la règle et il tutoie souvent le sublime, rejoignant Jerry Maguire et Singles dans le panthéon du cinéaste.
Disons-le de suite, si vous cherchez une comédie romantique, un film d’action ou même un film comique, passez votre chemin. À la manière des Capra de la grande époque, Nouveau départ respire l’optimisme sans jamais tomber dans la mièvrerie. Et la caution « Histoire vraie » ne trompe personne : c’est bel et bien un conte que propose Cameron Crowe, servi par un Matt Damon et une Scarlett Johansson tout en finesse. Bien entendu, ce cinéma n’est pas un cinéma pour cyniques. Il n’est pas fait non plus pour ceux qui aiment tourner les autres en dérision. Ici, les personnages les plus improbables ne sont jamais ridicules, les situations parfois rocambolesques ne sont pas montées artificiellement en épingle et la trame de l’histoire, linéaire, simple, ne se permet pas démagogie.
Si le duo d’acteur est formidable, les deux enfants ne sont pas en reste. La petite fille qui joue le rôle de Rosie est désarmante de naturel. Et l’ado qui joue Dylan, son frère l’interprète avec une subtilité rare les fragilités de cette période charnière de la vie. Si on y ajoute Elle Fanning, tout aussi merveilleuse que dans Super 8, c’est bel et bien l’humanité qui intéresse Crowe. La dernière phrase du film en est même l’aveu.
Au delà de l’aventure humaine que vécut le vrai Benjamin Mee en achetant ce zoo, c’est surtout la réflexion sur le veuvage qui a dû attirer Cameron Crowe. Son héros est un homme qui a du chagrin, mais qui refuse d’endosser la pitié dans le regard des autres. Sa fuite en avant, dans laquelle il va entraîner sa famille, est surtout un combat pour ne plus dépendre de ce passé. À cet égard, la romance qui va s’installer entre lui et la chef gardienne (et qui ne trouvera son dénouement qu’à la toute fin du film) en est presque anecdotique. Le véritable tournant du film intervient quand il va devoir accepter de faire abréger les souffrances d’un vieux tigre. Devant revivre l’agonie de son épouse, il va enfin accepter la mort de celle qu’il a aimée dès le premier jour. Et c’est à ce moment qu’il va comprendre son fils, renouer des liens détruits. Cameron nous parle de la vie à travers la renaissance d’un zoo, les épreuves, les contrôles tatillons, les obstacles financiers… Sa mise en scène n’est jamais grandiloquente. Elle est à hauteur des personnages et de l’histoire. Et même s’il se permet quelques éléments oniriques, jamais il ne trahit la nature même du film : parler de l’humanité qui se cache en chacun de ses personnages.
Et parallèlement à la renaissance du père, on assiste en filigrane à la naissance du fils et à son amour naissant pour Elle Fanning. Un travail tout en douceur également, fait de regards, de non-dits, de quelques paroles échangées. Mais en mettant en parallèle la déclaration de Dylan et l’éblouissement du père quand il rencontre sa future femme, Cameron Crowe met alors en scène la naissance de deux amours, la promesse de deux belles histoires.
Nouveau départ est un film d’un humanisme poignant qui ne rencontra guère de succès en dehors des USA, hélas. Le découvrir en vidéo est la meilleure chose qui puisse lui arriver car, c’est lentement, tranquillement qu’il va développer sa puissance. Et les dernières images effacées, on ressort serein, calme et optimiste. C’est peut-être cela qu’on appelle la puissance du cinéma.