Voici la toute première chronique qui fut mise en ligne sur l'ancien SOI. Pas un chef d'oeuvre, mais un film que je vis au
cinéma à l'époque et dont je pensais le plus grand bien.
Ecartons tout de suite la polémique. Oui, Terre Champ de Bataille a été écrite par le type qui a inventé la scientologie , pseudo-religion dont le seul but semble être celui de plumer le gogo. Oui, Travolta qui a voulu adapter le film pendant 15 ans est un scientologue. Mais non, Battlefield Earth n'a pas grand chose à voir avec la scientologie. Si vous cherchez un roman qui développe à fond les thèmes de la scientologie (le refus de la psychologie entre autres) voyez plutôt du coté de Mission Terre , un ouvrage en 10 volumes qui se laissent lire sans déplaisir.
N'étant pas scientologue (et n'ayant pas vraiment envie de le devenir) et disposant de mon libre arbitre, de mes pensées et du contrôle de ma vie, j'ai donc pu assister à la projection du film de Roger Christian en toute quiétude et je peux donc livrer ici une analyse purement cinématographique : Battlefield Earth est un film spectaculaire mais inégal, surtout dans sa dernière partie.
Reprenant de manière assez cohérente l'essentiel des romans (car l'oeuvre de départ est répartie en trois tome), le script s'attache à la fois à décrire la destinée de Jonnie Goodboy , sorte de figure messianique classique et la société des Psychlos, extraterrestres surpuissants et dégénérés à travers la figure de l'un d'eux, Terl, chef de la sécurité. Ici l'opposition entre les hommes, redevenus primitifs et les ET n'appelle pas de nuance. Les barbares ne sont pas ce que l'on croit et les hommes, même redescendus au bas de l'échelle de l'évolution, conservent une noblesse qui fait défaut à leurs adversaires.
Battlefield Earth commence par de superbes images montrant les derniers hommes , vivant comme des rats dans des cavernes. La première partie du film (environ les deux premiers tiers) suit donc la rencontre entre Jonnie et Terl. Terl croit voir en Jonnie l'instrument qui lui permettra de quitter cette planète qu'il déteste. Jonnie lui comprend que s'il parvient à duper Terl , il pourra détruire l'empire Psychlos. Cette première partie est largement la meilleure , car , prenant son temps, elle installe les personnages, les enjeux et surtout les marques du conflit à venir.
Mais la fin du film ne tient pas les promesses car, handicapé par un budget très mince et surtout l'impossibilité d'adapter totalement le livre, la dernière phase de la lutte est expédiée trop rapidement. Contrairement à ce que l'on peut lire partout, Battlefield Earth ne se conclut pas à la moitié du roman mais à la moitié du troisième tome. Des passages entiers comme l'union des tribus de la Terre entière ont disparu, l'empire Psychlos n'est qu'évoqué qu'au travers de quelques vues de la planète mère et les autres races extraterrestres ont totalement disparu. Dans le livre, Jonnie devait faire admettre la Terre au rang de puissance galactique pour conjurer le péril. Tout ceci a disparu. Certes le script termine le film avec une fin ouverte mais prend quand même le soin de finir l'histoire, au cas où le box office ne serait pas favorable. C'est le cas (21 millions de recette aux States) et il est probable que l'on ne verra jamais la fin du troisième roman.
Un découpage en deux films avec une vrai fin ouverte (comme dans les romans) aurait sans doute permis de conserver l'essence totale de l'histoire.
La dernière partie, pour spectaculaire, lorgne trop du coté d'ID4. Les tribus primitives réussissant à dompter des avions Harrier est absolument invraisemblable. La destruction de l'empire Psychlos est à peine suggérée. Dommage car Christian réussit à rendre son monde crédible. Même si les contraintes budgétaires sont criantes, il parvient à imprimer des séquences époustouflantes , se référant à La planète des Singes, pour les cages réservées aux humains ou bien la superbe désintégration du dôme Psychlos. Travolta se délecte dans le rôle de Terl, sur jouant intentionnellement et restituant parfaitement les ET du roman.
Battlefield Earth n'est donc pas la réussite espérée mais constitue une tentative de faire revivre de la vraie SF. Il est clair que le public n'a pas adhéré à cette volonté de refaire de la SF à l'ancienne. Nul doute que si Battlefield Earth avait été écrit par un non-scientologue, le résultat commercial aurait été tout autre.
Même si le film ne tient pas ses promesses, il n'est absolument pas le désastre annoncé . Les amateurs du roman (et ils sont nombreux) retrouveront, certes dilué, le charme unique de cette lutte classique entre le bien et le mal.