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19 février 2013 2 19 /02 /février /2013 06:32

p12643.jpgLe pitch : Sans s’en rendre compte, un jeune hacker manque de déclencher une 3e guerre mondiale.

 

La récente ré-édition Blu-ray, pour son 30e anniversaire, est l’occasion idéale de revenir sur Wargames.

 

Les années 80 ont cela de formidable qu’elles ont vu éclore des technologies qui nous semblent si familières qu’on en oublie qu’elles eurent un début. Ici, sous couvert de faire un film sur la guerre froide, John Badham s’intéresse surtout à l’informatique, à une époque où les ordinateurs étaient loin d’être « personnels », destinés à une « élite » capable de les dompter.

 

Le scénario peut paraître obsolète aujourd’hui, surtout dans son aspect guerre froide, mais il s’inscrit totalement dans la vague nationaliste qui submergea l’Amérique de Reagan, même si, ici, l’ennemi n’est pas clairement la Russie. Elle n’est qu’un élément du conflit et les militaires américains semblent être plus dangereux par leur jusqu’au boutiste que les « rouges » du Kremlin.

 

Autre élément daté, c’est bien entendu les décors, les costumes, les coiffures, la musique même. Tout ici sonne furieusement années 80, ce qui n’est pas pour déplaire aux nostalgiques de cette époque ou à ceux qui y grandirent. C’est d’ailleurs assez amusant de se dire que l’on a l’impression de regarder un film « historique » alors que, durant sa conception, il était totalement actuel, voire en avance. Dans une informatique balbutiante, un modem téléphonique était quelque chose que l’on ne voyait quasiment jamais. Or, le jeune David (Matthew Brodderick dans un rôle inoubliable) possède un matériel de pointe et s’inscrit dans la logique du geek : moyen en classe, génial derrière sa bécane. La seule différence avec la caricature que l’on se fait de ce type de personnage, il est assez craquant pour avoir une petite amie et ajouter un soupçon de romance à ce techno-thriller !

 

Si l’on passe donc sur le vieillissement du film, c’est surtout son aspect paranoïaque qui est intéressant. En décidant de faire l’impasse sur l’homme, et de mettre en avant la machine, les militaires prouvent le peu de cas qu’ils font du facteur humain. Or, si cet aspect du film semblait exagéré à l’époque, il suffit de voir la politique d’Obama misant tout sur les drones ou, dans les années 90, le projet Echelon qui n’a pas su voir venir le 11 septembre pour se dire que là aussi, le film était prophétique.

 

De cette paranoïa va donc découler une grande partie du film dont l’idée géniale est d’avoir humanisé l’ordinateur via une voix digitalisée. Cette concession au grand public (là aussi, les synthétiseurs vocaux étaient plutôt rares en 1983) permet une meilleure fluidité de l’action et des dialogues. L’affrontement est-ouest se transforme donc en une course contre la montre entre David et la machine. Autre aspect paranoïaque, l’interprétation que font les militaires des intentions du jeune garçon, notamment quand il lui demande « Avec qui part-tu à Paris, David ? ». Or, dans le film, si David réserve des billets d’avion, c’est juste pour épater sa copine. Mine de rien, cette intrusion informatique dans la vie privée est désormais une réalité totale. Une bonne exploitation de votre disque dur et de l’historique de votre navigateur donnera quasiment toute votre vie ! Et je ne parle même pas de Facebook, outil certes fabuleux mais incroyablement liberticide vu le nombre ahurissant de données privées que certains exposent à la face du monde.

 

Cependant, il est injuste de classer Wargames dans la vague de films reaganiens des années 80. Car, s’il en garde pas mal de codes (le héros adolescent, un certain culte de la réussite sociale paradoxalement teinté d’un appel gentil à une certaine révolte), il va cependant assez loin dans la réflexion sur l’Amérique de cette époque. Il y a donc la paranoïa anti-rouge, la volonté des militaires et du FBI de contrôler les citoyens, la recherche de l’efficacité maximale des armes nucléaires, mais il y a aussi dans le scénario une dénonciation très vive de tout ce que je viens d’énoncer. La dernière phrase du film est éloquente « Drôle de jeu, où l’on ne peut pas gagner ». Elle résume bien l’histoire : tout ce qu’a fait David n’aura finalement servi qu’à apprendre à une machine que la guerre ne donne pas de gagnant, mais que tout le monde y perd. John Badham prend clairement position contre cette uniformisation informatique de la guerre voire de l’informatique tout court. Car c’est quand il manipule un ordinateur que David a les pires ennuis, y compris quand il recherche des réponses dans la machine du NORAD. De même, Badham utilise la figure ultra-connue du savant dépassé par son invention et dépossédé de son travail par les militaires. Le fait qu’il se fasse passer pour mort en dit long sur les intentions de l’armée américaine. Sous couvert de « petit » thriller, le réalisateur est relativement sévère avec son pays, nettement plus que dans Tonnerre de Feu (où il mettait cependant en garde contre une société où la vie privée serait contrôlée par la police).

 

D’un point de vue cinématographique, Wargames bénéficie du solide savoir faire du réalisateur de La fièvre du samedi soir ou Comme un oiseau sur la branche. Badham n’est peut être qu’un faiseur, mais il le fait bien ! La direction d’acteur est excellente, la mise en place de l’histoire et du suspens fait bien monter la pression et jamais on ne s’ennuie. C’est sans doute cette combinaison, alliée à son sujet, qui font que Wargames devint le 5e film le plus vu aux USA avec 79,5 millions de dollars de recette, juste derrière Un fauteuil pour deux, Flashdance, Tendres passions et, bien entendu, Le retour du Jedi (qui du haut de ses 250 millions de recette rapporta plus d’argent que ses 3 challengers). Il se permit même de faire plus d’argent qu’Octopussy !

 

Revoir le film 30 ans sa création montre que si la technologie a changé, les questions restent les mêmes. Est-on prêt à sacrifier notre liberté, y compris celle de faire la guerre, au détriment de notre liberté ? Badham disait clairement que non !!

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La côte

***** Chef d'oeuvre !!

**** Très bon, allez y vite !!

*** 1/2 * Entre le bon et très bon, quoi...

*** Un bon film

** Moyen, attendez la vidéo

* Comment ai-je pu aller voir ça ??

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