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15 mai 2018 2 15 /05 /mai /2018 06:52
Justice League (*** 1/2*)

Le pitch  : Convaincu qu'une invasion alien est en cours, Batman cherche à réunir une équipe de super-héros autour de lui et de faire revenir Superman à la vie.

 

On ne saura jamais ce qu'aurait été Justice League si Zack Snyder n'avait pas du quitter le film suite au décès de sa fille. Car si le réalisateur de 300 et Watchmen était la cheville ouvrière du DC Universe depuis Man of Steel, il est évident que son absence a plombé cette franchise. De même, on ne saura sans doute pas avant longtemps ce qu'il avait en tête, comment il comptait faire évoluer les personnages (rappelons que le film devait être en deux parties) et surtout est-ce qu'il avalisait toutes les tentatives d'humour dans les dialogues (certaines sont drôles, d'autres tombent à plat) dans un univers qu'il avait voulu sérieux, dur et "réaliste" dès le départ.

 

Car, et on touche là une incompréhension de la part de la critique, l'univers DC n'est pas l'univers Marvel. Tout ce que la Distinguée Concurrence a publié depuis des années met en scène des demis-dieux flottant au dessus d'une humanité devenue spectatrice de leurs affrontements. Pas de second degré (ou alors bien assumé comme dans Suicide Squad) , pas d'humour facile, pas de concession au politiquement correct. Même les relaunch de l'univers DC restent cosmétiques et ne modifient pas fondamentalement le ton sombre des comics.

 

Le problème est que DC n'est pas distribué en France comme Marvel, la plupart du travail est effectué par Urban Comics en librairie. Pas mal de journalistes en sont restés à la vision du Batman des années 60 ou du Superman optimiste de Donner. Snyder a choisi l'option post Crisis on infinite earths et a donc développé un univers où les personnages plus grand que nature évoluent dans un cadre dangereux, option déjà mise en place par Nolan pour sa trilogie Batman.

 

Man of steel donnait le ton avec son affrontement final entre Zod et Superman, un combat dantesque où les habitants de Métropolis devenaient de la chair à canon quand s'effondraient les immeubles, les deux titans ne se préoccupant pas du tout des dommages collatéraux.

 

Batman Vs Superman poursuivaient dans cette voie, avec un Batman , certes manipulé par Luthor, mais enclin à la violence et prêt à tout pour écarter la "menace" venue de Krypton. Suicide Squad introduisait un brin d'humour, mais au final, les vilains de chez DC n'en restaient pas moins des gens dangereux, peu enclins à la rigolade et dont la "rédemption" ne trompait personne. 

 

Finalement, seul Wonder Woman présentait une vision plus optimiste de DC, mais Snyder, supervisant toujours, plaçait délibérément Diana en pleine première guerre mondiale, afin d'expliquer la misanthropie affichée dans BvS.

 

Cette longue introduction passée, qu'est ce qui pèche dans Justice League ?

 

Deux grands défauts , en fait. Le premier est d'avoir voulu introduire 3 nouveaux personnages (Aquaman, Cyborg, Flash) que l'on a juste vu par fragments dans BvS et Suicide Squad. Là, où Marvel avait présenté tous les Avengers dans leur propre film (sauf  la Veuve Noire, apparue dans Iron Man 2), Warner/DC s'est précipité pour créer son film crossover. Il manque un chainon, un long métrage qui aurait pu amener les origines d'au moins un des personnages. Il aurait également fallu introduire un autre dans Wonder Woman, Aquaman par exemple puisque Amazones et Atlantes se connaissent. Cette invasion de nouveaux personnages, plutôt réussis, se fait qui plus est dans un film bien trop court (1h50 sans le générique) et ils sont forcément réduits à des silhouettes , Aquaman étant le personnage le plus sacrifié. C'est d'ailleurs dommage que la relaunch de DC en 2012 (dont j'ai déjà parlé dans mes articles sur les meilleurs séries récentes) avaient totalement redéfini le personnage et en avait fait autre chose qu'un type "qui parle aux poissons".

 

L'autre est les coupes évidentes qu'a subi le métrage et qui entraînent bien des frustrations. Pourquoi Batman est-il convaincu d'une invasion imminente en affrontant juste un paradémon ? Quid de la résurrection de Superman (toute l'organisation du plan passe à l'as) ? que désire vraiment Steppenwolf ? Pourquoi évoque-t-il Darkseid (le méchant ultime du Relaunch de 2012) ? 

 

Alors s'il n'est pas évident de voir quelles scènes ont été ajoutés ou retournées par Josh Whedon , il est cependant clair que JL manque de liant et accumule les raccourcis scénaristiques énormes. Au départ, Snyder envisageait 2 films qui devaient sortir à un an d'intervalle, ce qui aurait donné une fresque de plus de 4 heures et qui aurait permis justement de présenter les personnages, les enjeux, d'établir un climax et un cliffhanger dignes de ce nom.

 

Or, pour des raisons stupides, suite au départ du réalisateur, la Warner a décidé de refaire toutes les erreurs qu'elle avait commis sur la franchise Batman à partir du 3e : multiplier les personnages, privilégier l'action sur la réflexion, faire des coupes sombres dans l'histoire et agir dans la précipitation. L'édifice mis en place depuis 2013 s'écroule donc et bien malin est celui qui sait comment va évoluer le DC univers. Et même si la scène post-générique donne une indication de ce que serait un Justice League 2, on reste dubitatif sur la façon dont le studio a quasiment mis par terre sa franchise.

 

Enfin, on regrettera la façon dont l'arsenal de Batman est mal mis en avant. Le "transport de troupes" , qui avait été superbement analysé dans SFX et les design de Patrick Tatopoolos sont très mal exploités. Dommage vraiment quand on sait le travail énorme qu'a effectué le Français sur la franchise.

 

Cependant, Justice League, malgré ses défauts, est loin d'être un film raté. La première partie qui voit Batman rechercher des alliés et sa culpabilité dans la mort de Batman sont franchement à la hauteur des Comics. Le film prend son temps, expose les enjeux et créé même du lien avec la trilogie de Nolan, notamment à travers les dialogues. Le spectateur est certes invité à combler quelques trous (ainsi, on apprend que cela fait 20 ans que Batman fait la loi à Gotham, comme on avait compris dans BvS et Suicide Squad le rôle du Joker dans la mort de Robin), mais celui qui connaît un peu le comics n'est pas perdu.

 

Les confrontations avec Steppenwolf sont également à la hauteur, même si ce méchant manque de charisme. Le flashback de son premier affrontement sur Terre est absolument hallucinant (la présence du corps des Green Lantern donne vraiment le frisson) et donne vraiment à regretter le fait que Snyder ait du quitter le navire. Car si tout le film avait été à la hauteur de ce premier acte, on se serait pris une sacrée claque.

 

Retenons également les scènes où le pouvoir de Flash se manifeste, avec de somptueux ralentis. Bien sur, l'inspiration vient du Vif Argent de Days of future past, mais il n'empêche : la façon dont il va redonner son épée à Diana est un grand moment du film.

 

Les nouveaux personnages, même esquissés, sont réussis. Cyborg reprend le design du comics, ce qui n'était pas chose aisée. Flash apporte une touche de légèreté bienvenue (son admiration envers Batman/Bruce Wyane) et son évolution est intéressante, passant du fan transi au héros qui n'hésitera pas à risquer sa vie pour aider les autres. Enfin, le passage où Bruce Wayne estime que Clark Kent est plus humain que lui car il a fait le choix de vivre comme un homme malgré son immense pouvoir est , à mon sens , le sommet du métrage. 

 

Justice League est donc un "film malade". Malade de ses compromis , malade d'avoir cédé aux  sirènes de la critique (mis plus bas que terre, BvS et Suicide Squad ont tout de même trouvé leur public) en voulant adoucir l'image de la franchise pour, au final, échouer au box office (les résultats finaux sont 100 millions en deçà de BvS, SS , 200 de WW et 70 de Man of Steel - Quand au monde, avec 657 millions, JL fait moins encore que Man of Steel, pour un coût bien supérieur).

 

Mais en l'état, il reste un film distrayant , techniquement bien fichu (on tiquera quand même sur l'aspect final de Steppenwolf, dont le rendu fait un peu trop jeu vidéo) et qui permet de poser quelques jalons pour le futur, un futur qui commencera en décembre prochain avec le film sur Aquaman et en mai 2019 avec Shazam.

 

Le fan DC ne pourra cependant que regretter, une fois de plus, le concours de circonstances qui a amené Warner à saboter le travail mis en place depuis 5 ans, tout en espérant que le studio va (enfin) apprendre de ses erreurs.

 

 

 

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17 avril 2018 2 17 /04 /avril /2018 07:38
Ready Player One (*****)

Le pitch : 2045. Le monde est à cours de ressource et les villes tentaculaires défigurent encore un peu plus la planète. Des millions de joueurs investissent un monde virtuel , l'Oasis. Or, le créateur de ce monde mort 5 ans auparavant  l'a laissé en héritage à celui qui sera capable de trouver les 3 clés qu'il a cachées dedans.

 

Steven Spielberg continue donc d'alterner reconstitution historiques et films pop corn. Après le le triptyque Tintin/Cheval de guerre/Lincoln et le dyptique Le pont des espions/Le bon gros géant, Ready Player one succède donc à Pentagon Papers. On notera que depuis quasiment 10 ans, le réalisateur trouve donc son inspiration dans les faits réels ou adapte des oeuvres littéraires.

 

Disons le tout de suite, Ready Player One est un véritable chef d'oeuvre , un film magistral qui rend hommage à la pop culture avec une virtuosité qui frôle le vertige, une plongée fascinante dans les entrailles d'un monde virtuel truffé de références et d'une richesse inouïe. Je n'ai pas lu le roman (mais je vais m'y employer très très rapidement) et il est clair que le matériel de base, référentiel en diable, y est pour beaucoup , mais il fallait bien tout l'immense talent de Spielberg pour rendre passionnant et accessible à tous un monde de geeks, biberonnés à la pop culture des années 80, aux jeux vidéos, au cinéma d'Amblin et à tout un pan de l'Amérique.

 

A plus de 70 ans, Spielberg fait preuve d'un sens du découpage toujours aussi précis (le plan d'ouverture où le héros descend de son "appartement", la première course , la séquence dans l'Overlock...). On sait depuis Les dents de la mer, soit plus de 40 ans qu'il a un don pour rendre lisible n'importe quelle séquence, qu'il ne cède pas à la facilité d'un montage haché (un style maîtrisé par une poignée de réalisateurs). Ici, l'utilisation de la voix off permet de compléter ce qui est à l'image. En quelques minutes, le spectateur le moins assidu aux nouvelles technologies sait ce qu'est l'Oasis, quels sont les enjeux, qui sont les gentils, les méchants et le but de chacun. A partir de ce pitch simple (après tout, on est dans une "banale" chasse au trésor comme en propose n'importe quel jeu vidéo), il fait dérouler le fil de son histoire, dévoilant petit à petit les failles de ses protagonistes, tous issus de familles brisées (comme Spielberg lui même) et émaillant le métrage de séquences de plus en plus spectaculaires , là aussi, comme dans n'importe quel jeu. Prenez, au hasard, le dernier Zelda "Breath of the Wild" ou Super Mario Odyssée et vous avez la même mécanique, avec des boss de fin de niveaux de plus en plus puissants, des situations de plus en plus complexes et un sentiment de victoire dès que vous parvenez, enfin, à passer l'obstacle qui vous bloque depuis des jours.

 

On a reproché à Ready Player One sa dichotomie entre le monde réel et le monde de l'Oasis. Or, c'est justement cela qui fait tout le sel du film. D'un côté un univers sale, déglingué, repoussant et de l'autre un monde où tout est possible, d'une beauté numérique saisissante, reprenant un à un tous les codes des jeux vidéos actuels. Mais en les amplifiant, en les sublimant. Car aucun jeu actuel n'arrive à la perfection de l'Oasis. En ce sens, le travail des graphistes est incroyable et il se hisse sans aucun souci à la hauteur de ce que fait Pixar. Mais pour quelqu'un qui a dirigé la meilleure adaptation d'une BD de ces 20 derniers années, le challenge était-il si grand ?

 

L'autre opposition est bien entendu entre les avatars et les personnages réels. En choisissant des acteurs qui ont chacun leur "tares" physiques à compenser dans l'Oasis, Spielberg nous tend un reflet déformant , miroir de nos sociétés où chacun cherche sa meilleure photo de profil, à embellir sa vie via Facebook. Dans les jeux vidéos actuels dit "réalistes", les personnages sont toujours plus grand, plus fort, plus beau que dans la vraie vie. Le virtuel tend à prendre le pas sur le réel et Photoshop est devenu le correcteur de toutes nos tares photographiques. Mais le réalisateur ne juge pas. Il a toujours assumé de toutes façons son côté geek et il préfère s'en amuser , l'utiliser pour faire son film.  Et si son message peut paraître naïf (on n'a pas besoin d'être un Apollon pour être un héros), il reste très salutaire.

 

Côté monde "réel", il est intéressant de comparer RPO avec Minority Report, dernière incursion de Spielberg dans la science fiction pure et dure, datant de 2002. Et on peut y trouver des analogies, comme cette impression de fouillis, d'empilement. Cependant, le monde de RPO est finalement bien moins futuriste que celui de MR, puisque l'humanité a décidé de ne plus gérer ses problèmes et de vivre dans le monde de l'Oasis. Cette impression de déliquescence est l'autre fil conducteur de l'histoire, une critique voilée d'une société qui abdique devant le réel, sauf peut être le vilain qui veut toujours plus de pouvoir. 

 

C'est d'ailleurs peut être cet aspect qui est le moins convaincant. Car si les "mauvais" geeks veulent contrôler l'Oasis, c'est pour y vendre plus de publicité. Mine de rien, le script dénonce l'un des aspects les plus "pénibles" du net, avec ces pages envahies de pop up, de liens à cliquer , de publicités ciblées... Mais bon, s'il faut trouver un point faible au film, c'est sans doute celui-ci.

 

Mais il n'entame en rien la passionnante construction de l'histoire en 3 actes, avec la découverte du monde, la mise en place des alliances (extraordinaire réflexion sur  la façon dont la "vie" des avatars peut avoir une répercussion dans le monde réel) et l'affrontement final, qui se déroulera forcément dans les deux mondes.

 

Les amateurs attentifs prendront un malin plaisir à chercher toutes les références (la voiture de Retour vers le futur, la Batmobile, le géant de fer, la console Atari pour ne citer qu'eux sont évidemment les plus visibles, mais il y en a des dizaines d'autres) et ceux qui n'y connaissent rien seront sans aucun doute émerveillés par un tel foisonnement ! Car c'est bien un hommage à toute une culture populaire dans le bon sens du terme qui est rendu. 

 

Même le choix des acteurs va dans ce sens. Ainsi, l'un des deux créateurs de l'Oasis est Simon Pegg , grand geek devant l'éternel, tandis que son comparse est incarné par le nouvel acteur fétiche de Spielberg , Mark Rylance (que l'on aura également pu voir dans Dunkerque). Le duo évoque d'ailleurs sans aucune équivoque Steve Jobs et Steve Wozniak , les deux génies créateurs d'Apple, à la subtile différence que dans notre monde, c'est le pragmatique Jobs qui s'en est allé.

 

Mais le reste du casting est constitué d'acteurs ayant peu joué, des visages neufs qui ne voleront pas la vedette à l'histoire et qui incarneront à merveille les jeunes joueurs de l'Oasis.

 

Mené tambour battant, regorgeant d'idées visuelles fabuleuses (le bal en apesanteur, la file de joueurs tentant de trouver la clé en jouant à une vieille console Atari, l'assaut final contre la forteresse, le Détroit de 2045...) et ne laissant aucun temps mort à son public, Ready Player One est typiquement un film appelé à devenir culte, à être vu et revu afin d'en saisir toutes les références, toutes les idées.

 

Steven Spielberg vient tout simplement de rappeler qu'il a inventé le cinéma hollywoodien moderne il y a 43 ans avec Les dents de la mer et que très peu de monde ne lui arrive à la cheville.

 

Alors, évidemment, Ready Player One risque de laisser de marbre tout ceux qui se sentent étranger à cette culture geek, aux jeux vidéos ou à ce tourbillon de références. Ils verront sans doute des défauts que je ne vois pas. Mais le film étant conçu pour un coeur de cible dont je fais partie, je ne pouvais que lui mettre 5 étoiles tant il est réussi à mes yeux !

 

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28 février 2018 3 28 /02 /février /2018 12:18
Black Panther (****)

Le pitch : devenu roi du Wakanda après la mort de son père, lors des évènements de Civl War, T'Challa va découvrir que la vie de ce dernier n'est pas exempte de zones d'ombres et va se trouver confronter au défi de faire entrer son pays dans le concert des nations.

 

Evacuons tout de suite une polémique naissante : oui, Black Panther mérite son triomphe, mais non, ce n'est pas le meilleur film du MCU. Civil War, Avengers lui sont supérieurs. Et si l'on prend les films "solo" , Doctor Strange présentait un univers plus intéressant encore et le récent Spider-Man osait rebattre les cartes du mythe. Mais si on fait abstraction de ceci (ce qui n'est que subjectif qui plus est), alors Black Panther est un sacré bon film.

 

Evacuons également le casting ! Oui, Black Panther est constitué en majorité d'acteurs noirs et les deux seuls blancs (Martin Freeman et Andy Serkis) sont respectivement un agent de la CIA qui ne dévoilera son héroïsme qu'à la fin du film et une ordure. Et alors ? BP traite de la culture africaine de manière superbe et sans jamais tomber dans le misérabilisme (les scènes où T'challla affronte un adversaire dans le cadre de son couronnement sont un parfait exemple de l'exubérance africaine). Logique donc que les acteurs afro-américains soient convoqués ! Quel plaisir d'ailleurs de retrouver Angela Basset, immense dans Stange Days de James Cameron ou Forrest Withaker dans un rôle qui l'éloigne tellement de ce qu'il a l'habitude de faire.

 

Et comme BP est réalisé par un Afro-Américain, Ryan Coogler (dont ce n'est, mine de rien, que le troisième film), peut-on dire que, après le Wonder Woman porté par deux femmes, son actrice  et sa réalisatrice, le film de super héros fera plus bouger les lignes à Hollywood que les films à Oscars ? J'ose penser que oui.

 

Tout ceci étant dit, parlons du film.

 

Pour être honnête, j'avoue ne pas avoir vraiment vu de James Bond noir comme l'ont décrit plusieurs médias cinémas. Ok, il y a quelques gadgets, on peut voir dans la petite soeur du héros un Q au féminin, mais à un moment, il faut comparer ce qui est comparable.  C'est là qu'on se rend compte que pour parler de film de genre, il faut s'y connaître et non pas balancer des trucs histoire de faire "branché". Disons que pour ne pas être trop négatif, la scène du casino en Corée du Sud fait penser quelque peu à celle de Skyfall.

 

En fait, Black Panther est un excellent "premier" film, mais pas un film d'origine vu que, comme pour Spiderman Homecoming, on avait déjà vu le personnage dans Civil War. Donc, on ne perd pas de temps avec le pourquoi du comment. Tout y est savamment distillé (superbe générique de début, tout en particule de sable) au fur et à mesure de l'intrigue et, comme dans FF 56 (où apparaissait le personnage), cela suffit amplement. Après tout, on sait qu'il est héritier d'une longue tradition de roi et que le Wakanda est en avance sur les autres nations. Cela suffit à lancer l'histoire.

 

Ce qui m'a agréablement surpris dans le film, c'est ce savant équilibre entre hommage à l'Afrique (les scènes d'intronisation sont un vrai régal visuel) et action 100% XXIe siècle. Et le métrage répond même à mon interrogation première : pourquoi le Wakanda garde sa technologie sans aider ses "frères de couleur". La construction de l'histoire, avec ce flash-back qui ne dévoilera sa vraie teneur qu'au début du 3e acte permet justement de poser la question et d'y répondre. Il est évident que la vraie vedette du film est le vibranium et des implications terribles qu'il aurait s'il tombait entre de mauvaises mains.

 

Mais pour arriver à cette conclusion musclée, on passe donc par deux actes plutôt réussis. Le premier est classique et présente les personnages, y compris Klaw, très différent du comics (mais cela devient une constante chez Marvel). Et ils sont nombreux, entre la famille royale, les différentes tribus, les vilains, les ambigus comme l'agent de la CIA joué par Martin Freeman. Mais étonnamment, on ne se perd jamais dans cette galerie. On pourra reprocher à Coogler de tomber souvent dans le contemplatif avec des scènes amples, superbes mais un peu "poseur", mais honnêtement, ce qu'il montre est beau, grandiose même et les couleurs donnent un relief incroyable à toutes les scènes africaines. Il me faudrait revoir le film, mais tout ce qui se passe en dehors de l'Afrique est plus neutre, picturalement parlant. on sent vraiment que tout a été pensé pour donner une autre image du continent !

 

Le deuxième acte, celui où les buts de chacun s'affirment, est dominé par une excellente scène de vol au musée de Londres. Le plus étonnant est qu'à ce moment de l'histoire, la hiérarchie des vilains va s'inverser, chose très rare dans un film de super-héros, mais somme toute logique dans Black Panther vu que celui qui va prendre l'ascendant n'est autre que le jeune héros de Creed, Michael B.Jordan qui, comme Chris Evans, passe donc de la torche humaine à un personnage Marvel. A noter que Jordan aura donc joué dans les 3 films de Coogler.

 

Du coup, le film s'emballe un peu trop, les enjeux augmentent et T'challa connait les affres de l'échec tout en perdant son trône. Si le combat final parait finalement convenu (mais très spectaculaire), c'est surtout l'affrontement entre les deux prétendants , qui reprend schématiquement l'opposition entre Malcom X et Martin Luther King (les méthodes radicales contre le dialogue) qui est le vrai clou de Black Panther. Apre, tendu, permettant à T'Challa de comprendre à la fois les décisions de son père tout en restant fidèle à lui même, c'est cette victoire qui lui permettra de comprendre que le Wakanda doit d'ouvrir au monde.  Cela tombe bien vu que Thanos va bientôt attaquer la Terre !

 

Black Panther est donc un excellent cru Marvel, mais je regrette une dernière partie trop rapide et quelque peu convenue (l'arrivée des renforts qui avaient juré ne pas intervenir). Et puis, je pense que le potentiel du Wakanda, super nation africaine, n'est pas assez exploité. Cela viendra peut être dans la phase 4 du MCU, mais il y avait là une partie plus intéressante à jouer. Enfin, comment ne pas être déçu par le sort réservé à Klaw (excellent Andy Serkis, comme toujours).

 

Mais au niveau spectacle, le film tient ses promesses tout en se doublant d'un vrai festin esthétique. Coogler a parfaitement su gérer ses énormes moyens et son casting ! Alors oui, on peut dire que , au diable le politiquement correct, que Black Panther est une date dans le cinéma afro-américain, comme WW le fut pour le cinéma féminin !! Franchement, que Marvel continue à donner sa chance à des concepts aussi novateurs !

 

 

 

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23 janvier 2018 2 23 /01 /janvier /2018 08:45
Risen (****)

Le pitch : un tribun romain est mandaté par Ponce Pilate pour enquêter sur le vol du corps d'un juif crucifié 3 jours auparavant.

 

Aux USA, il existe une catégorie de films bien particulière : les films chrétiens. La plupart du temps, ils traitent de la foi (War Room par exemple) ou sur la façon dont la religion est présente en Amérique. De temps en temps, un péplum biblique s'insère dans cette filmographie qui traverse rarement l'Atlantique. Ainsi, en 2004, Mel Gibson explosa tous les compteurs du BO avec La passion du Christ, film ultra réaliste sur les dernières heures de Jésus. Avec plus de 360 millions de dollars en fin de course (et 300 autres dans le reste du monde), La passion du Christ prouva qu'il existait un public avide de films religieux.

 

Si le film de Gibson eut un retentissement énorme et visible, celui qui s'intéresse aux BO sait qu'il n'est pas un cas isolé et que, sans atteindre de tels sommets, régulièrement un  film "chrétien" (c'est le nom que leur donnent les analystes du BO outre Atlantique) grimpe à l'assaut du box office. Au passage, savez-vous que la trilogie Aslan est considéré comme faisant partie de la catégorie ? Il est vrai que la résurrection du lion dans le premier roman avait été conçu par CS Lewis, auteur qui ne cachait pas sa foi,  comme une approche du mystère de la passion pour ses jeunes lecteurs.

 

God's not dead, Heaven is for real, Son of god, Miracles from heaven, autant de petit budget qui attire un public souvent nombreux (91,4 millions de dollars de recette pour Heaven is for real par exemple).

 

Passée cette longue introduction, parlons de Risen qui s'inscrit logiquement dans cette catégorie, mais propose une approche totalement différente, s'inspirant à la fois de la crudité de Gibson (la crucifixion, la bataille d'ouverture, le charnier où l'on balance les corps des condamnés) et de l'enquête policière. Franchement, il fallait oser et si dans sa deuxième partie, le film bascule dans un contexte bien plus doux, le côté atypique de Risen étonne.

 

Derrière la caméra et co-auteur du script, le spectateur aura la surprise de découvrir Kevin  Reynolds ! Oui, l'auteur de Waterworld, Robin des bois, Rapa Nui ou La bête de guerre qui dirige un film qui annonce explicitement la résurrection du Chris (son titre français, d'ailleurs) !! Pourtant à y bien regarder, Reynolds s'est déjà approché de ce iusème avec Tristan et Yseult (l'amour courtois, donc encadré par l'église au Moyen Age). En fouillant un peu, son Rapa Nui s'intéresse également à la religion, celle de l'île de Pâques. Et sait-on que le premier script de Waterworld, écrit par David Twohy contenait bien plus d'éléments "bibliques" comme par exemple le fait que le personnage de Kevin Costner était décrit comme une sorte de Noé moderne ?

 

Mais ici, Reynolds n'avance pas masqué. Doté d'un budget de 20 millions de dollars (une misère pour un péplum, mais une manne bien plus importante qu'un film comme War Room), Risen joue déjà sur le réalisme : le tribun Clavius cherche à comprendre pourquoi on a volé le corps de cet homme crucifié, dont il  a assisté aux derniers instants . La réponse est essentielle car d'étranges rumeurs font état que cet homme serait revenu d'entre les morts et que si cela était vrai, cela pourrait inciter la province de Judée-Samarie à la révolte, ses habitants ne supportant pas vraiment la domination romaine. 

 

Dans un premier temps, Clavius enquête, interroge les témoins, les amis de ce  Jésus, cherche à comprendre pourquoi le tombeau est vide. Rationnel, il s'accroche à l'idée que l'on est venu chercher le corps (qu'il a lui même scellé avec une pierre). Mais petit à petit, son rationalisme s'étiole, des faits ne collent pas avec la logique, les romains chargés de la garde sont terrifiés par ce qu'ils ont vu. Et surtout, le corps est introuvable.

 

Dans des décors minimalistes, mais très réalistes, Reynolds fait donc avancer son intrigue, s'inspirant bien évidemment des Evangiles (l'intervention de Joseph d'Arimathie, la conversation avec Marie Madeleine ou Barthélémy). Il instille le doute dans l'esprit de son héros, mais également de son aide de camp.

 

Puis au détour d'une scène sublime ou Clavius reconnait dans l'assemblée des apôtres, dont il vient de débusquer la cachette, le visage de l'homme qu'il a vu mourir sur la croix, Risen devient un tout autre film : si le côté "chasse à l'homme" reste présent, on est désormais dans une histoire se calquant sur les écrits des apôtres quand ils vécurent encore 40 jours avec le Christ. Clavius est en fait le "candide", le non initié qui va faire découvrir aux spectateurs les racines du christianisme. Ses actions changent du tout au tout et il refuse alors de donner la mort (la scène où il conjure son aide de camp de ne pas le dénoncer et le laisse partir en vie). Il va alors être un témoin privilégié de l'action christique et pouvoir écouter directement la parole de ce dernier.

 

Risen est un film "pédagogique". Il est évident que Kevin Reynolds a voulu transmettre le mystère de la résurrection au public. A cet égard, il ne diffère pas tellement des évangélistes qui, partis de Judée, se répandirent dans le monde, au péril de leur vie, pour témoigner de ce qu'ils ont vu. Evidemment, Reynolds ne risque pas la mort, mais cet engagement profond est un sacré pari professionnel, surtout dans un monde hollywoodien qui n'est pas si tendre avec ceux qui affirment leur foi. Car si la religion est souvent présente dans les films, elle est plutôt un élément des personnages, comme par exemple, la foi des héroïnes de La couleur des sentiments.

 

Mais ce film pédagogique est-il un bon film de cinéma ? 

 

La réponse est oui. Reynolds n'a rien perdu de son cinéma, fait de superbes mouvements de caméra et d'un montage très étudié. Sans de gros moyens, il parvient à faire croire à cette Judée Samarie des origines, utilisant la moindre parcelle de ses décors (le film est tourné en Espagne notamment) . D'un point de vue de la dramaturgie, l'histoire est suffisamment prenante pour que, même en connaissant forcément la fin, on se passionne pour cette quête. Et la façon dont le script passe du thriller policier à l'aspect biblique est sacrément bien amenée, car, en voyant le film une deuxième fois, on voit bien que Reynolds a parsemé d'indices la quête de Clavius.

 

Bien évidemment, le film ne convaincra sans doute que les croyants. Les autres pourront y voir un excellent thriller pour peu qu'ils adhèrent à l'idée qu'un film n'ait pas forcément fait pour avoir un climax ultra spectaculaire. Mais que l'on soit croyant ou pas, Risen est une belle expérience qui a le mérite de poser une question essentielle : et si tout était vrai ? C'est ce que se dit l'aide de camp du tribun, quand il se rend compte que Clavius s'engage sur une voie inédite.

 

Si Risen n'a pas remporté le succès de War Room ou Heaven is for real (36 millions aux USA, 11 de plus dans le reste du monde, où sa sortie fut assez confidentielle), il n'en reste pas moins un film passionnant, profond, engagé et dont la figure du Christ plane tout au long du métrage.

 

A voir donc pour vous faire une opinion, mais si je lui mets 4 étoiles, c'est bien parce que, d'un point de vue cinématographique, pour moi, ce film est une réussite.

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9 janvier 2018 2 09 /01 /janvier /2018 07:41
Cars 3 (**** 1/2 *)

Le pitch : victime d'un grave accident et confronté à la montée en puissance de concurrents plus high tech que lui, Flash Mc Queen entreprend de se reconstruire sans vouloir renoncer à ses rêves de courses.

 

Décidément, la franchise Cars est étonnante. Après un deuxième épisode qui lorgnait sur le film d'espionnage et qui se centrait sur Martin (un épisode que j'avais trouvé très réussi) et un opus originel plus convenu (la personne arrogante qui découvre une vie plus simple chez des gens qu'il aurait méprisé), les nouvelles aventures des voitures parlantes se focalisent à nouveau sur Flash McQueen mais sans être un remake du premier épisode.

 

En fait, à l'instar de Toy Story 3, Pixar a décidé de faire "vieillir" ses personnages. Ainsi, Flash n'est plus la voiture performante des épisodes précédents et l'accident dont il est victime va l'obliger à accepter que le temps a passé et que s'il veut rester dans la roue des jeunes coureurs, il va devoir se faire violence et oublier une partie de ses acquis, se délester de ses vérités.

 

Du coup, la ré-éducation de Flash va se doubler d'un voyage nostalgique où la vieillesse, le passé, le temps d'avant sont à l'honneur. Ce parti-pris audacieux explique peut être le semi-échec du film, même si la franchise n'a jamais connu le triomphe des autres dessins animés Pixar, car il s'adresse nettement plus aux adultes qu'aux enfants. Certes, les gags visuels et les scènes délirantes (comme celle où Flash et son coach participent à une course de stock car dans la boue) ne manquent pas, mais on parle bien ici de lutte entre jeunes loups arrivistes et vieilles gloires tentant de survivre mais qui se tenaient les coudes. Pas très glamour comme concept. En fait Cars 3 emprunte une grande partie de sa thématique aux derniers épisodes de Rocky, quand l'étalon italien comprenait qu'il ne serait plus jamais le boxeur qu'il fut. Et il n'y a pas que Flash qui vieillit : des amis disparaissent, d'autres prennent leur retraite et vendent leur entreprise à des jeunes golden boy pressés de faire de l'argent , d'autres enfin vivent dans leur passé.

 

L'autre thème développé est celui de la poursuite de ses rêves. Cruz Ramirez la coach de Flash les a tous mis sous le boisseau , terrassé par un échec et si elle tente de faire diversion, son attitude montre bien qu'elle n'est pas si heureuse dans son travail. Et si la conclusion du métrage la remettra dans le chemin qu'elle n'aurait jamais du quitter, il lui faudra également faire un énorme travail sur elle même.

 

De manière étonnante, Cars 3 est sorti une année où les femmes ont été bien plus au centre de la planète cinéma, que cela soit par les films se reposant sur une héroïne, soit par le plus gros succès obtenu par une réalisatrice (Wonder Woman, de Patty Jenkins qui a enfoncé les films de Katryn Bigelow des tablettes) ou par la triste affaire Weinstein (qui est en train de tourner au n'importe quoi). Or, par un subtil basculement scénaristique, Cruz va reléguer Flash au second plan dans le tout dernier acte du film, une idée brillante et surprenant, d'autant plus qu'elle est bien amenée comme le montre une deuxième vision du film.

 

Visuellement, les progrès de l'infographie made in Pixar ont permis un univers encore plus riche, avec plus de textures et de détails, comme ces bouts de gomme de pneus qui  jaillissent à l'écran quand la caméra virtuelle serre de très près les roues des véhicules lors des courses. Les couleurs également sont sublimes, parfois très flashy, parfois aussi douces qu'un pastel. L'énorme travail sur cette palette laisse pantois.

 

Présentant toujours plus de paysages américaines sublimes, après le tour du monde réussi du 2e opus, Cars 3 rend hommage à la ruralité et une Amérique dite profonde, trop souvent méprisée par une certaine forme de cinéma. Depuis le premiers Cars, Lasseter et son équipe ont voulu mettre à l'honneur la route 66, les petites villes, les préoccupations simples des gens vivant loin des mégalopoles. Pour avoir traversé une partie de l'Amérique (conduisant de New York à Supérior, une bourgade de 26 000 habitants du Wisconsin et traversant des états comme la Pennsylvanie, l'Ohio, le Michigan ou longeant les grands lacs), j'ai pu voir de visu cette Amérique des grandes routes, des paysages grandioses et des toutes petites villes avec leur main street si caractéristique. 

 

Car 3 ne déroge donc pas à la règle et le voyage de Flash Mc Queen jusqu'en Floride puis à la recherche de origines de Doc, son mentor disparu, se double donc de visions extraordinaires de ces grands paysages américains.

 

Bien plus riche thématiquement qu'on pourrait le croire au premier abord , Cars 3 est donc une réussite de plus, mais une réussite douce amère, où le cheminement du héros ne s'achève pas forcément là où on le pensait. La série va sans doute s'arrêter ici, mais à la différence d'autres studios, Pixar aura eu l'immense intelligence de refuser de se répéter et d'empreindre cet ultime opus d'une réflexion poussée. Certains diront que ce film n'est qu'une oeuvre mineure pour le studio qui a révolutionné le cinéma d'animation avec Toy Story il y a plus de 20 ans, mais à l'instar du Voyage d'Arlo, métrage également très sous-estimé, Cars 3 offre bien plus que la majeure partie des films prétendus pour "enfant".

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20 décembre 2017 3 20 /12 /décembre /2017 06:35
Les derniers Jedi (****)

Le pitch : alors que la Résistance tente d'échapper au Premier ordre et à son leader Snoke, Rey  essaye de convaincre  Luke Skywalker afin qu'il revienne les aider dans ce nouveau combat contre le mal.

Attention ! Si vous n'avez pas vu le film, différez cette chronique car elle contient certains éléments qui vous en gâcheraient la vision.

Il y a 2 ans, Le réveil de la force avait remis la machine Star Wars en route, rencontrant un énorme succès mais sans forcément convaincre à 100%, la faute à un script qui se calquait beaucoup trop sur Un nouvel espoir et à un contexte politique très flou, sans oublier un certain galvaudage des éléments essentiels (la force traitée comme un vulgaire gimminck) mis en place patiemment par Georges Lucas

 

Les derniers Jedi se devait donc de confirmer ce succès tout en offrant, enfin, une nouvelle orientation à la saga.  

 

La mission est remplie mais pas à 100%. La faute à une intrigue parallèle très dispensable et à une volonté de  "surprendre" le spectateur alors qu'on ne pourra jamais faire plus grand choc que la révélation de l'Empire contre-attaque. Enfin, on peut quelque peu déçu par le fait que Ryan Johnson ait sciemment pris à contre-pied quasiment tous les éléments que Abrams avait mis en suspens dans Le réveil de la force : l'origine des parents de Rey et son lien avec Kylo Ren, Finn qui se réveille de manière ridicule, qui est Snoke.... Mention spéciale aussi à la recréation de la scène où Rey rencontre Luke, suivi par le geste du vieux Jedi balançant son sabre par dessus son épaule.

 

Comme pour Le réveil de la force, je ferai plusieurs chroniques. La première sera une "classique" et les autres s'intéresseront aux aspects les plus controversés du film.

 

Le point fort de ce nouvel opus est d'avoir su éviter le côté nostalgique et iconique du Réveil de la Force. On nous dit que Ryan Johnson est un fan de la saga depuis qu'il a vu Le retour du Jedi au cinéma, mais à la différence d'Abrams, il n'a pas hésité à en casser une partie des codes. Avec un pari aussi gonflé, le risque était grand de diviser le public. Cela n'a pas loupé.

 

Alors qu'on pouvait penser que le film se baserait sur l'initiation de Rey et sur la montée en puissance de Kylo Ren ainsi que du combat entre le Premier ordre et la résistance. Les évènements se déroulant immédiatement après Le réveil de la force - une première dans la saga où les laps de temps entre chaque partie de l'histoire étaient bien plus long (10 ans entre le I et le II, 3 ans entre le II et le III, 20 ans entre le III et le IV, 3 ans entre le IV et le V, un an entre le V et le VI et 30 ans entre le VI et le VII, laissant l'univers étendu prendre le pouvoir et combler certains trous), le sentiment d'urgence fait vite place à une course en avant, symbolisée par le vaisseau de la résistance talonnée par ceux du premier ordre. Une idée géniale, mais dont l'intrigue parallèle casse le rythme.

 

En effet, se rendant compte que le Premier ordre peut les suivre à travers l'hyper espace, Poe et Finn (aidés par une technicienne relativement pénible à mon goût) décident de se rendre sur le vaisseau de Snoke afin de désactiver le dispositif. Pour cela, ils ont besoin d'une personne capable de craquer les codes du Premier Ordre. Furtive apparition de Maas (une scène assez gênante ) puis direction une planète casino où s'encanaillent les personnages les plus riches de la galaxie. Alors que ces scènes sont massivement mis en avant dans les différents making of (par exemple le numéro de SFX dont je parlais ici) , elles sont quasiment inexistantes à l'écran, un peu comme si le réalisateur se désintéressait totalement de ce voyage. Si on y ajoute plusieurs Deus ex machina - les héros emprisonnés en même temps qu'un craqueur de code, les multiples interventions de BB8 qui tombe toujours à pic - on a là le passage le plus inutile de toute la saga. Ceux qui braillaient après la scène où Padmé et Anakin flirtent dans l'herbe de Naboo auront révisé leur jugement. Au moins, cette scène assez mièvre faisaient avancer les sentiments des deux personnages. Là, on a donc droit à une succession de scènes sans enjeu, si ce n'est la cavalcade d'une horde de bestiaux extraterrestres dans le casino, de dialogues d'une platitude extrême et surtout tout ceci ne sert à rien vu que le craqueur se révèle être un traitre au service du Premier ordre et que les héros ne parviendront pas à désactiver le dispositif du premier ordre. A moins que cette mission gâchée ne soit que prétexte au sacrifice d'un nouveau personnage...

 

Les derniers Jedi dure 2H30. En enlevant cette sous-intrigue, on aurait eu un métrage d'une durée plus canonique et son efficacité aurait été décuplée. 

 

C'est d'autant plus dommage car, je le répète, l'idée de cette course poursuite entre le premier ordre et la résistance dans l'espace est fabuleuse, génératrice de tensions au sein des héros (j'ai particulièrement aimé la façon dont Poe Dameron semble faire tout le temps les mauvais choix) d'autant plus que Leïa, gravement blessée n'est plus là pour apaiser les choses. Au passage, ceux qui critiquent la scène de son sauvetage oublient juste que, en tant que fille d'Anakin, elle possède aussi la force, mais n'a jamais voulu la développer que cela soit dans l'univers étendu (même si dans la BD Leïa paru en 2016, elle sentait la présence de sa mère quand elle visitait Naboo) ou les films. Après, tout Luke ne dit-il pas sur Endor "Ma soeur a ce don". Quel dommage que la mort de Carrie Fisher empêche toute évolution de son personnage dans ce sens ! En tout cas, l'épisode 8 lui donne un film digne de son rang !

 

En fait, à la différence des épisodes I à VI, où Lucas avait une trame depuis le début, on a un peu l'impression que la nouvelle équipe créative avance un peu au jugé. Cela explique sans doute ce sentiment d'inachevé.

 

Heureusement, les relations entre Rey et Luke, ainsi que son lien avec Kylo Ren (même s'il est expliqué que de manière fugitif par Snoke), et tout ce qui tourne autour de la force, sont fabuleuses. Certes, le script détruit l'aura des Jedi, mais après tout, Luke a-t-il vraiment tort quand il estime qu'ils ont laissé Dark Sidious s'emparer du pouvoir? On peut toutefois se demander d'où il tient ce nom. Peut être que Yoda lui en a parlé sur Dagobah. Luke est terrifié  à l'idée d'avoir échoué tout comme Obi-Wan avait échoué avec son père. Et que son échec a permis l'émergence d'un personnage encore plus sombre que Vador.

 

Rey idéalisant les Jedi , disparus de la galaxie depuis plus de 50  ans en tant que force majeure  politique, elle ne peut qu'être horrifiée par l'attitude de Luke. Et les rapports entre les deux personnages sont justement inédits : il n'y a pas le respect de Luke envers Yoda  ou le conflit latent entre Anakin ou Obi Wan. Ici, l'opposition est bien plus subtile et la puissance qui émane de Rey, clairement du niveau d'un Mace Windu ou d'un Yoda, laisse entrevoir , on l'espère, un dénouement apocalyptique entre elle et Kyo-Ren.

 

Luke décide de faire table rase du passé (il brûle l'arbre et les livres sacrés des Jedi, encouragé en cela par le fantôme de Yoda) mais est-il si différent de son neveu qui déclare à Rey vouloir renvoyer dans les limbes Jedi et Sith ? Il est évident que l'ordre ne pourra plus jamais être aussi puissant, alors pourquoi ne pas le laisser disparaître ? Et à ce moment là, le titre prend tout son sens : les derniers  Jedi doivent être pris dans le sens de ultimes. Luke et Kylo Ren pourraient bien terminer le travail de sape de Dark Sidious et Dark Vador entamé dans La revanche des Sith !

 

Certains fans ont hurlé à la trahison, déçu de voir Luke se transformer en ermite aigri, mais vu son échec, pouvait-il en être autrement ?

 

Le lien entre Rey et Kylo Ren est également une trouvaille fabuleuse et surtout inédite, même si les dialogues éloignés entre Jedi étaient déjà présents dans les premiers films :  Luke appelant sa soeur au secours après son combat contre Vador, Qui-Gon Jin hurlant "non" à Anakin quand celui ci massacre les hommes des sables, Yoda ressentant la souffrance d'Anakin... Mais jamais à ce point. Et même si le script ne répond à aucune question sur l'origine de Rey (espérons que ce que lui dit Snoke est faux, après tout les Sith sont les maîtres du mensonges) et évacue les chevaliers de Ren, ce lien est l'autre ciment du film. Depuis Le réveil de la force, on sait que Rey est bien plus qu'une pilleuse d'épave. Là, on la voit passer le deuxième stade de sa formation , au moment le plus dangereux pour elle, Luke estimant même qu'elle ait déjà passé du côté obscur.

 

Et ce lien, sublimé par la séquence sur le vaisseau de Snoke où, alliés un instant, Rey et Kylo Ren vont affronter les gardes de Snoke, fraichement tué par son apprenti, lance le 3e acte de l'histoire, celui où les enjeux culminent .

 

Car après la superbe bataille d'ouverture, le film va se conclure par l'assaut du Premier ordre sur une résistance décimée. Graphiquement, l'idée de cette terre rouge recouverte de sel est superbe et donne un aspect sanglant à la bataille. Mais c'est l'apparition de Luke , comme surgie de nulle part, qui élève le film à la hauteur des sagas de Luka ! Son combat avec Kylo Ren restera dans les annales d'autant plus que tout n'y est qu'illusion. Le geste où il essuie sa tunique après avoir été bombardé par les quadripodes du Premier ordre laissait à penser qu'il y a quelque chose qui "cloche". Luke , en s'ouvrant à nouveau à la force, a réussi à projeter son corps, un corps idéalisé (rien à voir avec le clochard échevelé vivant en exil) afin de faire gagner du temps à sa soeur et ses troupes.

 

Et quand le spectateur se rend compte de l'imposture, il est trop tard. Luke quitte ce monde pour se fondre dans la force. Là aussi, certains fans ont hurlé à la trahison, mais pouvait-il en être autrement. Avec sa mort, celle de Leïa (qui n'apparaitra pas dans l'épisode IX) et celle de Han Solo, la galaxie se trouve donc face à ses nouveaux maîtres. Reste à savoir quel chemin emprunteront Rey et Kylo Ren. A moins que Ben Solo ne revienne pour de bon ? Mais après tant d'horreurs, on peut en douter.

 

Visuellement, le film est à la hauteur et fait honneur à la saga. Pouvait-il en être autrement quand on sait que ILM tient toujours la barre ? Mais je reviendrai sur ce point dans un nouvel article.

 

En conclusion, sans être parfait (je me répète, mais pour moi La revanche des Sith reste insurpassable, ainsi que le final du Retour du Jedi), Les derniers Jedi est suffisamment puissant pour être une nouvelle pierre de voute de l'univers Star Wars. Espérons juste que le IXe épisode parviendra à l'équilibre et ne se contentera pas d'évacuer les réponses que tout vrai fan espère.  

 

 

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12 décembre 2017 2 12 /12 /décembre /2017 07:25
Les figures de l'ombre (****)

Le pitch : derrière les succès de la Nasa, il n'y avait pas que des astronautes. Il y avait aussi des hommes de l'ombre qui oeuvraient. Mais aussi des femmes. Noires de surcroit !

 

Passé inaperçu en France, tout comme La couleur des sentiments (il faut croire que le "pays des droits de l'homme" n'en a rien à faire des films traitant de la lutte des Afro-américaines) , Les figures de l'ombre mérite largement d'être découvert en vidéo. Je n'avais eu la chance de le voir en salle, car son temps à l'affiche avait été super court et j'ai attendu de le voir en Blu-ray pour le chroniquer.

 

Les deux premières scènes donnent le ton : une petite fille noire surdouée qui résout une équation devant des étudiants deux fois plus âgés qu'elle. Puis les trois héroïnes en panne de voiture, traitées comme des moins que rien par un shérif avant que ce dernier ne leur ouvre la route quand il comprend qu'elles travaillent à la Nasa.

 

A travers la trajectoire de 3 femmes noires, une mathématicienne de génie, une jeune ingénieur qui veut faire les mêmes études que les blancs et une matrone (Octavia Spencer, déjà vue dans La couleur des sentiments) qui, afin de sauver les emplois de son équipe, apprendra le  Fortran pour dompter les monstrueux IBM de l'époque, on suit l'évolution d'une société tout en plongeant dans les arcanes de la Nasa, à une époque où, concurrence avec la Russie soviétique oblige, elle dépendait de la CIA. Ou tout du moins, ses locaux étaient installés à Langley. Battre l'ennemi soviétique dans la course spatiale était un combat à mort !

 

La force du film est de s'intéresser à une période que tout le monde pense connaître, mais qui comporte des pans largement méconnus. A l'instar de L'étoffe des héros qui s'intéressait aux pilotes derrière le programme spatiale ou Apollo 13 qui décortiquaient la mission avortée, Les figures de l'ombre plonge dans les arcanes de la conquête spatiale de manière réaliste et fait revivre toute une épopée.

 

Mais, à la différence de ces deux glorieux aînés, le film se concentre sur les fourmis de cette conquête, les personnes que l'on ne voyait que comme figurants dans les autres métrages. Et la force du script est de s'intéresser à une minorité dans la majorité, ressuscitant une époque qui nous semble tellement étrangère par sa ségrégation, mais si proche finalement dans le temps.

 

Ainsi, l'une de scènes les plus incroyables du film est celle où Catherine, la mathématicienne surdouée, doit filer dans un autre bâtiment à plus de 800m parce qu'il n'y a pas de toilettes pour gens de couleur dans celui où elle travaille. On a peine à croire qu'une telle organisation ait existé. Une autre scène choque, celle où John Glenn arrive à Langley et salue les employés. Tout à coup, il décide d'aller saluer également l'autre groupe, celui des gens de couleur. Même dans la foule admirative, la ségrégation était de mise.

 

Mais je me garderais bien de jeter la pierre à l'Amérique car elle a su faire face à ses erreurs et, même si tout n'y est pas parfait, l'Europe a-t-elle fait aussi sa révolution "raciale" ?

 

Mélangeant images d'archives avec reconstitutions ultra fidèles des vols spatiaux, Les figures de l'ombre n'a pas vocation à être spectaculaire. La conquête spatiale n'y est finalement qu'un prétexte pour parler d'égalité, de racisme ordinaire, de combats féministes. Et le fait d'avoir pris le très grand Kevin Costner (mâtin !! Quel acteur ! Chacune de ses apparitions dans un film est un régal) pour contrebalancer le casting afro-américain est une idée de génie. Car quel autre acteur personnifie à ce point une certaine idée de l'Amérique ? D'un abord très froid, c'est son indifférence à la couleur de la peau de ses employés (pour lui, ils doivent donner le meilleur d'eux même et c'est tout) qui fera évoluer la Nasa, et par ricochet la société de Virginie.

 

Si Costner montre la façon dont un homme peut s'interroger sur les préjugés qui, mine de rien, étaient normaux et acceptés par quasiment pout tous, Kristen Dunst , excellente, représente la face qui a plus du mal à accepter le changement. Dans un rôle ingrat et difficile, elle livre une prestation des plus convaincantes. Mine de rien, la petite fille de Entretien avec un Vampire et la MJ de la première trilogie Spider-Man est devenue une femme tout en améliorant encore son jeu d'actrice, l'épurant et la hissant à la hauteur des plus grandes.

 

Dommage d'ailleurs que le cinéma américain, tout comme pour Costner, n'ose pas lui faire plus confiance.

 

Bien entendu, les héroïnes sont bien ce trio féminin afro-américain, Taraji P.Hanson en tête dans la peau de cette mathématicienne géniale qui permis à John Glenn de s'envoler au delà de notre planète. Son interprétation est fabuleuse car jamais elle ne cherche à militer. Elle ne fait que son travail et gagnera le respect par lui, pas par des quotas ou des passe-droits. Là aussi, le rôle est casse-gueule car la tentation d'en faire une passionniaria était grande.

 

Si Janelle Monae a un rôle plus effacée que ses deux comparses, Octavia Spencer retrouve la gouaille de La couleur des sentiments dans un rôle pas si éloigné de femme faisant bouger les lignes par son action.

 

Vous l'aurez compris, Les figures de l'ombre ne pourra que satisfaire tous ceux qui s'intéressent à l'histoire américaine contemporaine, mais aussi à tous ceux qui aiment voir une belle histoire et un beau combat au cinéma.

 

Le Blu-ray rend amplement justice à l'atmosphère colorée de l'époque, l'image est très piquée et le son sait se déchaîner dans les scènes spatiales.

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28 novembre 2017 2 28 /11 /novembre /2017 06:53
Wonder Woman (**** 1/2*)

Le pitch : élevée par sa mère et sa tante sur une île préservée du monde extérieur grâce à une barrière magique érigée par Zeus, l'amazone Diana va se trouver brutalement retrouver confronté à la réalité de la première guerre mondiale...

 

Il n'est pas peu dire que l'annonce de la présence de Wonder Woman dans BVS en a intrigué plus d'un. Le souvenir de la série télévisée très kitsch des années 70-80, le manque de visibilité de l'amazone dans les comics publiées en France et, avouons le, le ratage retentissant de films consacrés à des super héroïnes (Catwoman, Elektra, Tank Girl...) n'incitaient pas à l'optimisme. Et puis, miracle, l'apparition du personnage aux côtés de Batman et de Superman montrait un personnage charismatique, moderne, jolie sans tomber dans la caricature et , finalement, on a commencé à se dire qu'un film centré sur ses origines serait une bonne idée.

 

C'est effectivement une bonne idée car au final, Wonder Woman se hisse sans aucun doute à la hauteur du Superman de Richard Donner, aux Batman de Nolan ou à Spiderman 2 de Sam Raimi. Le film tient la dragée haute à une grosse partie du MCU et s'impose comme un sommet du monde DC transposé au cinéma ! Ce qui n'est pas un mince exploit quand on sait que les trois premiers films (Man of Steel, BVS, Suicide Squad) sont quand même de sacrés bons métrages.

 

En fait la réussite de Wonder Woman tient en deux mots : liberté créative. Que le réalisateur soit une réalisatrice a permis évidemment de mieux comprendre la psychologie du personnage, mais le fait qu'elle ait pu le faire qu'elle avait en tête a grandement facilité cette réussite. Et il est intéressant de voir, sur le making of, que la forte proportion féminine dans l'équipe a permis d'amener une vision différente et d'éviter de tomber dans les clichés des films dédiés aux super héroïnes. Et si WW doit forcément s'intégrer dans un univers plus vaste qui a été défini par Zack Snyder (mais aussi son épouse), Patty Jenkins a clairement créé son film comme un métrage quasi-indépendant, dont le seul lien est la photo qui avait permis à Bruce Wayne de comprendre que la voleuse qui avait piraté les données de Lex Luthor était bien plus qu'une jolie femme, et a également disposé de toute la liberté qu'un tel sujet pouvait offrir. Si on y ajoute un budget pas aussi démesuré que les autres films de super héros, et surtout une excellente histoire retraçant les origines de Diana telles que vues dans le comics classique, Wonder Woman pouvait-il rater sa cible ?

 

La première partie va donc se consacrer à Themyscas, la légendaire cité amazone où, petite fille, Diana assiste à l'entraînement des autres femmes de son peuple. Bulle intemporelle et idyllique, sublimée par les décors extraordinaires de la côte italienne (même si bien aidés par des renforts numériques), Themyscas est le cadre idéale pour qu'une enfant puisse grandir et s'aguerrir, même si cela déplait quelque peu à sa mère. Diana affirme tôt un caractère quelque peu rebelle et même la tragédie qu'ont subi les dieux de l'Olympe ne parvient pas à la détourner de son idée fixe : devenir une guerrière au service de la paix. Le casting entièrement féminin fait preuve d'une très grande solidité et les figurantes, toutes choisies pour leurs qualités athlétiques, se sont investies à fond dans leur préparation, même si, au final, leur temps de présence à l'image est somme toute réduit.

 

Puis l'arrivée de Steve Trevor (excellent Chris Pine) va brutalement confronter Diana à la réalité : la guerre existe et , pour elle, elle ne peut être que l'oeuvre d'Arès. Et même si elle a commencé à découvrir l'étendue de ses pouvoirs, elle est loin de se douter de la puissance qui émane d'elle et ce sera le choc éprouvé lors de son entrée dans le monde des hommes qui va, petit à petit, lui donner conscience qu'elle est plus qu'une simple amazone. La bataille sur la plage, superbement chorégraphie prouve que la violence n'est pas que le fait des hommes et que, poussées au pied du mur, elles sont de redoutables adversaires. Diana décide donc d'aller vers le monde extérieur afin de le purger de sa violence.

 

Le film s'oriente alors vers une véritable et excellente comédie de moeurs. Habituée à un monde matriarcale, coloré et égalitaire, Diana va découvrir un monde où la femme est un citoyen de deuxième ordre, un objet joli mais dénué de pouvoirs. La scène où elle doit choisir des habits et celle où elle est chassée du conseil de guerre montrent bien ces deux facettes : en 1918, c'est "sois belle et tais-toi". Et même si Steve se montre protecteur, ne faisant qu'obéir aux préceptes de son temps, il va vite se rendre compte que Diana est bien plus qu'une jolie jeune femme. Une scène coupée (visible sur le Blu-ray) les montrait d'ailleurs sur le bateau qui les emmène dans le monde réel discuter de choses bien  coquines, à la grande surprise de Steve qui prend conscience qu'il a affaire à quelqu'un bien plus secrète qu'elle n'en a l'air.

 

La force de Wonder Woman est de présenter ses pouvoirs comme quelque chose de naturel. Elle parle toutes les langues, possède une force surhumaine, peut dévier les balles et son agilité n'a rien à envier à celle de Superman. Le spectateur sait qu'elle est une guerrière née puisqu'il l'a vue terrasser Doomsday dans BVS. Mais la façon naturelle dont Gal Gadot s'est emparée du rôle force le respect. C'est elle qui fait croire au spectateur qu'elle possède tous ses dons. De ce fait, le film n'a pas besoin d'explications superflues. Et si cette partie est pauvre en action, elle va poser tous les enjeux de l'histoire.

 

Enfin, le dernier et long acte voit l'héroïne en action. D'abord sur les champs de bataille, puis contre les armes secrètes allemandes et enfin contre Arès. Quand on sait que l'histoire originale vient de Zack Snyder, on comprend mieux que ce troisième acte soit si riche en action, même s'il ne tombe pas dans la surenchère gratuite. Car ce qu'accomplit Diana est dicté par son coeur, pas par sa colère ou par un sentiment d'injustice. Personnage au coeur aussi pur que celui de Superman, Diana veut réellement mettre fin à la guerre et offrir aux hommes la paix qu'elle connaissait sur son île. On comprend que la brutalité des scènes auxquelles elle va assister va ébranler sa foi et la conduire vers le personnage quelque peu cynique et désabusé de BVS.

 

L'une des bonnes trouvailles du film est d'avoir mis Diana à la tête d'une petite escouade de soldats tous très différents les uns des autres (d'où la fameuse photo). Cette idée permet d'alléger le ton de la dernière partie et de démultiplier les points de vue lors des scènes finales, même si le combat entre Wonder Woman et Arès va focaliser l'action du spectateur. Un duel très spectaculaire et qui, après avoir offert deux actes finalement très terre à terre, remet le film dans sa dimension  mythologique.

 

Wonder Woman est donc une réussite quasi-totale (tout juste peut-on noter une baisse de rythme au deuxième tiers du film et quelques dialogues un peu mièvres), portée par une réalisatrice et une actrice totalement habitées par leur sujet. Le succès mondial du film, le fait qu'il sera le film de super-héros le plus vu aux USA cette année est amplement mérité. Et dans le contexte nauséabond de l'affaire Weinstein et autres pervers hollywoodien, il arrive pile au bon moment pour balancer un sacré pavé dans la mare : oui une femme peut tenir à bout de bras un blockbusters, en faire une réussite visuelle et obtenir un triomphe mondial. Puisse l'industrie du cinéma en tenir compte !

 

Quelques mots sur le Blu-Ray. L'image et le son sont superbes, avec de très bonnes pistes arrières lors des scènes de combat. Franchement , Warner ne se moque pas de nous. Quand au long making of, divisé en une dizaine de modules, il est à l'image du film : brillant, bien écrit, très didactique et surtout il rend bien hommage à toutes les femmes qui ont travaillé sur le projet, avec une mention spéciale quand une classe de jeunes filles désirant travailler dans le cinéma viennent visiter le projet ! Les vrais Wonder Women, ce sont elles finalement : des femmes et des filles qui désirent prendre d'assaut un monde patriarcal, non pas pour le singer, mais pour l'améliorer.

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14 novembre 2017 2 14 /11 /novembre /2017 14:02
Thor Ragnarok (****)

Le pitch : peu de temps après avoir mis à jour la supercherie de Loki qui avait pris la place de leur père, Thor est défait par Hela et se retrouve prisonnier sur une lointaine planète où il devra affronter…Hulk !

3e épisode pour le fils d’Odin et nouveau changement de cap pour la série. Après le très shakespearien (tout du moins pour sa partie sur Asgard) du premier film de Kenneth Branagh et le mixage technologie/mythologie du Monde des ténèbres, Ragnarak plonge avec délice dans un monde cosmique digne des Gardiens de la galaxie, tout aussi coloré et fun. Disons le tout de suite, cette rupture de ton est une réussite alors qu’on pouvait craindre un affadissement de la saga qui, à force de s’inspirer de trop de choses, aurait pu perdre son identité.

Le mérite en revient à un script plutôt futé, à la longue présence de Hulk/Bruce Banner (une idée franchement géniale , même si les liens avec le comics Planet Hulk sont somme toute plutôt légers) et à une volonté de faire évoluer Thor dans les mondes inspirés de la période Kirby .

L’univers dessiné Marvel existe depuis 56 ans et les auteurs du MCU qu’ils soient réalisateurs, scénaristes, décorateurs… peuvent donc puiser à loisir dedans. Pour Thor, ce retour au style très coloré du King, à ses décors Bigger than life, et à la réjouissante naïveté des sixties est sans aucun doute un choix excellent. 

Car, mine de rien, alors qu’on pourrait penser que cela devient compliqué de se renouveler pour ce 17e film Marvel, les choix iconoclastes (mais pas tant que cela) permettent de différencier Ragnarok des deux autres films, mais aussi du reste du MCU. En jouant sur l’humour (Thor peut être un personnage sinistre et sérieux dans le comics) tout en faisant avancer son héros , Ragnarok frappe au bon endroit. Sans atteindre la quasi-perfection de Civil War ou Doctor Strange (qui fait ici une excellente apparition, prolongeant la scène post-générique du film consacrée à Stephen Strange), Ragnarok est à la fois un divertissement de haute tenue (le combat Hulk/Thor vaut, à lui seul, le prix du ticket), un très bon film de super héros et un tourbillon délirant d’influence.

Bien aidé par d’excellents seconds rôles, Jeff Goldblum en tête, le film ne peut que plaire aux amateurs de comics, à ceux de SF (Thor passe la moitié du film à parcourir la galaxie, une rupture de ton assez éloignée des comics, mais préparée par Le monde des ténèbres) mais aussi à ceux qui aiment se marrer au cinéma. Car l’humour est réussi, les gags et les dialogues jamais lourdingues (ce que pouvait laisser craindre la bande annonce). Thor descend quelque peu de son piédestal comme le symbolise la perte de ses cheveux. Chez les rois mérovingiens, les cheveux longs étaient le symbole de la royauté. Et quand le dernier roi de cette dynastie fut évincé par Pépin le Bref, il lui fit raser la tête pour bien marquer la perte de son pouvoir royal. Ici, Thor va perdre en grande partie ses attributs divins, notamment son marteau, et devra alors compter sur des alliés peu recommandables : une valkyrie alcoolique, Hulk, Loki , jamais avare d’un tour pendable… Ce n’est qu’à la fin du film, dans son combat final contre Héla que l’on verra , enfin, la puissance du dieu du tonnerre. Mais cette victoire sonnera comme une victoire à la Pyrus , le Ragnarok emportant alors Asgard et exilant sa population dans les étoiles.

On le voit, le 3e opus fait considérablement évoluer le personnage et les situations, s’inscrit parfaitement dans le MCU (on constate une fois de plus que tout est planifié depuis longtemps, le script se permettant même de réparer une erreur de continuité par rapport au gant d’infinité) et donne le ton pour les futurs épisodes d’Avengers.

Visuellement, on est toujours dans le haut du panier. Les effets spéciaux ayant fait de tels progrès ces dernières années qu’il devient presque banal de le dire. Pourtant, Ragnarok se fait fort de proposer des environnements inédits et très bien filmés. On regrettera juste que le montage écarte parfois trop vite certains décors.

Enfin, la musique est également surprenante ! Balancer Immigrant Song de Led Zeppelin dans un film d’Heroïc Fantasy à tendance SF, il fallait oser ! En fait, Thor Ragnarok est un vrai film rock’n’roll et Chris Hemsworth est vraiment LE bon choix pour incarner un super héros tendance rock star ! Et son passage dans Ghostbusters 2016 aura permis de montrer son sens du comique.

Bref, pour la 3e fois cette année, Marvel parvient à faire les bons choix, évite longueurs des Gardiens de la galaxie 2 et fait la parfaite synthèse entre humour et action. Car, sans le dire, Ragnarok relance le buddy movie cher aux années 80 et 90 ! Sauf que ce ne sont plus deux flics aux méthodes opposées, mais un dieu déchu et un homme prisonnier de son monstre qui surmontent leurs différences !

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27 octobre 2017 5 27 /10 /octobre /2017 08:46
Blade Runner 2049 (*****)

Le pitch : K, un répliquant de nouvelle génération, chargé de traquer les vieux modèles Nexus qui se cachent encore sur Terre depuis 30 ans, découvre une chose qui pourrait changer la face du monde et va, petit à petit, être amené à changer de camp.

 

Le chef d'oeuvre de Ridley Scott est sans conteste l'un des plus beaux films de toute l'histoire du cinéma ! Une oeuvre parfaite où le visuel grandiose se conjugue à un scénario palpitant et une mise en scène d'anthologie. Et malgré les différentes versions, Blade Runner que cela soit celui de 82, 92 ou 2002, est inscrit au panthéon du cinéma. 

 

Autant dire que la mise en chantier d'une séquelle avait de quoi inquiéter, surtout aussi longtemps après. La nomination (et l'adoubement par Scott) de Denis Villeneuve a tempéré ses inquiétudes. Puis la bande annonce a clairement montré la direction prise et enfin la vision du film a confirmé que Blade Runner 2049 s'inscrivait de manière magistrale dans les pas de son aîné.

 

Il aurait été tellement facile de massacrer la "franchise" en banalisant le propos, en en faisant un simple film d'action alignant les scènes spectaculaires ou en affadissant le propos.  L'intelligence des concepteurs de la séquelle a été de se rappeler ce qu'est Blade Runner, et non pas de le faire à leur sauce. 

 

Qui plus est, on a droit à une véritable suite et non un faux remake. L'histoire parle toujours de ce qu'est un être humain, ce qui le définit, mais la quête de K ajoute une couche supplémentaire : et si l'humain artificiel pouvait dépasser l'homme y compris dans le domaine de la création ?

 

C'est cette question qui est au centre du film et de la recherche de K. Simple "objet" obéissant aux hommes qui pourtant le méprisent, le répliquant (interprété subtilement par Ryan Gosling) va petit à petit s'émanciper de sa tutelle humaine pour tenter de vivre sa propre existence. Sa quête va l'amener à retrouver Dekkard, toujours en vie après les évènements de 2019. Et si l'ambiguïté du premier film n'est plus de mise (d'entrée, la couleur est annoncée : K est un répliquant), la rencontre entre les deux personnages, outre le fait de créer un pont entre les deux films, permet surtout de rappeler à quelques égarés que Ford est un grand acteur et que son panthéon personnel (Han Solo, Harrison Ford, Dekkard, Richard Kimble ou Jack Ryan) ne sera sans doute jamais égalé. La vieillesse lui va comme un gant et le script joue de cette façon dont l'ancien Blade Runner a évolué, comment il s'est caché après s'être enfui avec Rachel.

 

Visuellement, le film est également à la hauteur de son aîné. Mais on pourrait dire que c'est la partie la plus facile, vu que les moyens colossaux (150 millions de dollars de budget) ont rendu la partie plus simple. Sauf que lorsqu'on lit les articles sur les SFX, on s'aperçoit que les concepteurs des effets visuels ne se sont pas contentés de simples images de synthèse mais, au contraire, ont utilisé des maquettes, des plateaux réels... A l'instar de Christopher Nolan qui ancre ses effets dans la réalité, Villeneuve a voulu que son Blade Runner 2049 soit physiquement présent et non entièrement issu d'ordinateurs ! La vision pessimiste qu'il propose prolonge évidemment celle de Ridley Scott, même si les lieux visités par ce film sont quasiment vides le plus souvent (le Las Vegas de 2049, les fermes californiennes, la "plage" de la scène finale) alors que ceux du film original grouillait comme des fourmilières. Mais le climat est toujours aussi déréglé, la brume et la pluie omniprésente et même les décors mégalomaniaques de la Wallace Corporation, qui a pris le relais de la Tyrell Corporation, évoque un monde qui n'est plus tout à fait conçu pour l'homme.

 

A cela s'ajoute des trouvailles exceptionnelles comme ce programme informatique qui permet à K de s'inventer une vie sentimentale et qui va s'avérer bien plus qu'un simple gadget. Les effets visuels permettant la création de la "compagne" sont également extraordinaires. Mais comme pour l'original, ils sont toujours au service du film.

 

La musique participe également de la réussite. En s'inspirant du score électronique de Vangelis, Hans Zimmer supervise un score tout en élégance et en longues plages planantes. Les deux musiciens à son service n'ont pas non plus cherché à "moderniser" le travail mais bel et bien à rendre hommage. Certaines scènes sont sublimées par la bande originale, notamment les moments où K survole la ville.

 

Enfin, il faut parler de la mise en scène de Denis Villeneuve. Il s'inscrit dans les pas de Ridley Scott tout en gardant son propre style, ce qui est tout de même exceptionnel ! Jamais il ne cherche à ré-inventer la roue, mais jamais il ne cherche non plus à renier sa façon de faire. En fait, il se met au service de l'histoire tout en faisant son film. Si Scott avait été aux commandes de cette séquelle (on sait qu'il en parle depuis 1995), le film aurait été sans doute différent.

 

En soi, Blade Runner 2049 est donc, à mes yeux, une réussite totale, qui place la barre très très haute. S'il est encore trop tôt pour savoir si l'aventure continuera (les résultats mondiaux sont corrects, mais sans doute loin des espérances de Sony), contentons nous de ce que nous avons déjà : deux chefs d'oeuvre réalisés à 35 ans de distance par deux visionnaires ! Franchement, c'est déjà exceptionnel !

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La côte

***** Chef d'oeuvre !!

**** Très bon, allez y vite !!

*** 1/2 * Entre le bon et très bon, quoi...

*** Un bon film

** Moyen, attendez la vidéo

* Comment ai-je pu aller voir ça ??

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