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29 août 2008 5 29 /08 /août /2008 07:49
Le pitch : À travers l’histoire de Célie, Spielberg raconte le destin d’une famille afro américaine dans le sud des USA.

Quand en 1986, Steven Spielberg décide de quitter le monde des petits aliens, des aventuriers et des requins géants, la critique s’interrogea. Comment cet homme, roi du bloc-fumeur , pouvait-il oser s’attaquer à un sujet sérieux, en l’occurrence La couleur pourpre, un roman sur la condition d’une femme noire aux USA durant le premier tiers du XXe siècle !! Le monde impitoyable du show business lui fera d’ailleurs un affront terrible : aucun Oscars en 86 malgré plusieurs nominations majeures !!

En fait, en 84, Spielberg vient de signer son film le plus noir (à l’époque) : le temple maudit où sous couvert d’aventure en Inde, il arrache des cœurs à mains nues, torture des enfants et introduit tout un folklore barbare à un public médusé. C’est à cette époque où Lucas et lui voient leur couple partir en quenouille. Le cinéaste a sûrement dû douter. La réalisation de La couleur pourpre va lui permettre de changer brusquement de trajectoire !!

Disons le tout de suite, c’est un des rares Spielberg que je n’ai jamais vu en salle. À l’époque , je me ruais plutôt vers des blockbusters comme Highlander ou Karaté Kid II et des spectacles bien « couillus » comme Rocky IV, Cobra ou Aliens. J’avoue qu’un périple dans le Sud profond ne m’intéressait pas.

Et je ne fus sans doute pas le seul puisque seuls 1,7 millions de spectateurs se rendirent voir la mue du maître !!

Grave erreur !! Je ne saurais jamais comment rendent les magnifiques paysages sur un très grand écran. Je ne saurais jamais comment rend le visage incroyable de Whoopy Wholberg sur une surface de plusieurs centaines de mètres carrés et je pourrais jamais savoir comment une salle réagissait à ces scènes folles comme la bagarre dans le cabaret, la découverte des lettres ou les retrouvailles de Célie avec les enfants.

Car Spielberg, en changeant de registre, a réussi un coup de maître, un film d’une densité extraordinaire où il aborde le racisme, la brutalité conjugale, l’inceste, la condition noire (les blancs ne sont ici que des figures passagères) et même l’homosexualité féminine (d’une manière fugace, il est vrai).

Les critiques se sont acharnés sur le caractère angélique du film, sur le fait que même l’infâme Monsieur, joué à la perfection par un Danny Glover impérial, obtient sa rédemption en offrant à la sœur de Célie son « billet » de retour aux USA.

Mais qu’en est-il ? Angélique, une séparation d’un demi-siècle ? Angélique, des existences sexuelles misérables où le viol le dispute à l’inceste ? Angélique, une plongée dans un racisme ordinaire où la parole du blanc vaut plus que celle du noir.

On accusa aussi Spielberg de misérabilisme alors que l’observateur sérieux peut voir que le quotidien matériel de Célie et de ses compatriotes évolue, que le matérialisme et le modernisme profitent aussi à la classe noire. Spielberg n’a fait que prendre la description d’un quotidien en évolution !!

Formidable cinéaste de divertissement, le réalisateur a ici appliqué ses codes à une œuvre plus terre à terre mais sans tomber dans le pathétique ou le politiquement correct. Ici, les noirs ont les mêmes défauts que les blancs, ni plus ni moins. Les ridicules accusations de racisme tombent d’elles mêmes !!

Au final, La couleur pourpre raconte l’histoire d’âmes en peine qui vont retrouver le chemin du bonheur et du pardon (voir ainsi cette scène magnifique où la chanteuse envahit l’église pour demander à son père de la reprendre dans sa vie). Spielberg filme la foi comme un spectacle joyeux et ose la mettre en parallèle avec le cabaret d’Harpo !!

Comme tout film de Spielberg , la facture technique est irréprochable et la reconstitution historique d’une maîtrise parfaite. Le cinéaste, qui adore reconstituer une époque, s’en donne à cœur joie et recrée un Sud de carte postale, finalement bien éloignée de l’idée qu’on s’en fait. Il met son art au service de son histoire et refuse de faire dans le spectaculaire : ses paysages et ses images le font à sa place !!

N’oublions pas la musique : pour la seule fois de sa carrière depuis Les dents de la mer, il ne fait pas appel à son vieux complice John Willams mais au musicien de génie Quincy Jones. Jusqu’au bout de sa logique, Spileberg ne limite pas les afro-américains à son seul casting.

Film à la fois triste et joyeux, film chorale où émerge un personnage, La couleur Pourpre est à l’image du paradoxe Spielberg : capable de terroriser la planète avec des dinosaures et de lui mettre la conscience à l’épreuve.

Dommage qu’en 86, je ne fus pas assez « grand » pour le comprendre !!

Ce n’est pas grave, la vidéo a tout rattrapé. Warner a édité, il y a quelques années un magnifique double DVD. C’est celui ci qui a remplacé ma vieille VHS enregistrée sur feu La 5 !!
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4 juillet 2008 5 04 /07 /juillet /2008 07:10

AI

Je continue ma rétrospective Spielberg, toujours à l'envers. Voilà ce que je j'avais écrit à la sorti de AI , l'un des tous premiers articles de l'ancien SOI

AI est le plus beau film de Spielberg depuis ET. 

Voilà ma critique pourrait s'arrêter là. En dire plus n'ajouterait rien à cette phrase. 
Tout le monde sait que ET est un film sublime qui bouleversa et continue de bouleverser la planète entière , un espèce d'Ovni filmique d'une sincérité désarmante , une oeuvre à part dans le cinéma. 

Depuis ce monument Steven Spielberg a aligné des chefs d'oeuvre : Indiana Jones et Le temple maudit, Empire du Soleil, La liste de Schindler, Il faut sauver le soldat Ryan. Il a aussi fait cadeau au public de blockbusters jouissifs comme les deux Jurassic Park sans compter ses multiples productions (Men In black, Twister.....). Il a créé un studio, Dreamworks. Bref, depuis 20 ans, Spielberg a révolutionné le cinéma. 

Ses détracteurs ne voient en lui qu'un cynique assoiffé de dollars. Les critiques le méprisent , lui reprochant tout et n'importe quoi. Qu'importe, Spielberg reste le réalisateur le plus influent et le plus complet qui officie à l'heure actuel, un bourreau de travail qui ne vit que pour une chose : le cinéma. 

Alors si je dis que AI est son plus beau film depuis ET, toutes les barrières critiques tombent. Je ne fais pas dans l'objectif mais le subjectif et je pense sincèrement que AI restera comme un chef d'oeuvre de Spielberg. 

Qu'il ait repris un projet de Kubrick (en fait c'est le grand réalisateur anglais qui lui a demandé de réaliser le film) n'a que peu d'importance . Certes on retrouve certains éléments de la filmographie de Kubrick (l'aspect froid, l'interrogation sur cette vie artificielle déjà présente dans 2001) mais AI est un film de Spielberg à savoir un film maîtrisé, fluide comme jamais (certains plans séquences sont à tomber) , doublé d'une parabole sur la vie absolument parfaite. 

Epaulé par des comédiens en apesanteur (le jeune Haley Joël mérite l'oscar !!) et blindé par un scénario d'une poésie rare aujourd'hui (le dernier atteignant ce sommet fut un certain Abyss) , AI est une oeuvre magnifique transfigurée par des moments intenses comme le festival de Chair , d'images sublimes comme le survol de Manhattan ou la planète recouverte de glace. 

Spectaculaire et intimiste, humain et artificielle, grandiose et modeste, AI est tout cela à la fois. Un film d'exception qui restera dans l'histoire du cinéma.
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26 juin 2008 4 26 /06 /juin /2008 06:40
Le pitch : Indiana Jones cherche à retrouver un mystérieux crâne de cristal, avant une équipe russe qui cherche à acquérir une arme ultime.

Disons le tout de suite, si j’ai tant tardé à mettre la chronique d’Indy 4 c’est que, dégoûté par les spoilers lus à droite et à gauche, j’ai choisi d’attendre que le film soit sorti depuis un moment pour en parler.

Je pense que si vous lisez cette chronique, vous avez vu le film. Sinon, revenez quand vous l’aurez vu.

Indiana Jones et le crâne de cristal est sans doute l’une des arlésiennes les plus attendues du cinéma. Pensez qu’il y a 19 ans qu’Indy, son père et le professeur Brody s’éloignaient sur fond de soleil couchant. Certains d’ailleurs refusent que leur héros reviennent et renient ce 4e épisode. Pas bien grave, chacun peut avoir son avis.

Indy 4 fonctionne à la nostalgie. On a envie de revoir le personnage et dès sa première apparition, un frisson nous parcourt l’échine. Certes, Ford a vieilli mais Spielberg en a tenu compte. Jones n’est donc pas un Jason Bourne carburant au viagra et ne survivant que par les effets numériques mais un homme de 65 ans qui cherche à faire son travail le mieux possible.

En fait, Spielberg a réalisé son film comme il le faisait il y a 20 ans. On croirait presque un retour en arrière, comme si La liste de Schindler, AI ou Il faut sauver le soldat Ryan n’avaient jamais existé. Exit donc le montage brutal de Minority Report, exit les questionnements sur notre monde de La guerre des monde ou Munich, exit aussi la photographie délavée de Kaminski , qui a dû reprendre ici le style lumineux de Douglas Slocombe.

On pourrait penser que le réalisateur radote mais c’est tout le contraire. Refusant de se fondre dans la mode, ou de moderniser à outrance sa mise en scène des Indy, il permet au spectateur de respirer et de suivre agréablement les péripéties du film.

Idem pour le montage : on reste dans du Michael Khan pur et simple : c’est lisible, c’est incroyablement efficace et l’on se situe tout de suite dans l’espace. Par contre, on ne peut qu’être étonné par les faux raccords.

Visuellement, cet épisode est splendide et compte des décors magnifiques, sans doute les plus beaux de la saga : du hangar immense où l’armée US range toutes ses « trouvailles » au temple des extra-terrestres, du bar typiquement 50’s au cimetière péruvien en passant par les multiples passages dans la jungle, à aucun moment on ne retrouve le côté un peu cheap des premiers épisodes. Il est vrai que le numérique aide énormément et les effets visuels, superbement intégrés, sont une réussite incontestable. On se rappelle que pour le 3e épisode, ILM avait travaillé à la va vite et fournit des effets de qualité très inégale.

Belles images, beaux décors, bon montage, bonne mise en scène. Mais quid de l’histoire ?

Hé bien, elle n’est pas mal du tout. Certes, certaines pistes auraient mérité d’être explorées (qui sont ces gardiens du cimetière ?). Certes, certains rebondissements ne sont pas très crédibles (le coup du frigo pour échapper à une explosion nucléaire, c’est peut-être rigolo mais pour le réalisme…). Certes, la méchante Russe est sous-exploitée. Mais au final, là aussi, David Koep a réussi à garder l’essence des personnages, introduisant quelques clins d’oeils aux premiers films (l’arche d’alliance) et même à la série (Pancho Villa) qu’on espère enfin éditée en DVD en France. Indiana reste l’aventurier bougon et chanceux que nous aimons tous, la tête brûlée qui réfléchit après avoir agi, bref là aussi, pas de réactualisation. Tant mieux.

D’autant qu’en introduisant Shia Labeouf, malgré une imitation un peu trop exagéré du Brando de l’équipée sauvage, le scénario pallie à la fois l’absence de Sean Connery et ouvre une porte vers un passage de relais. Ainsi, la scène où Mutt ramasse le chapeau de son père, tente de le mettre sur sa tête avant qu’Indy ne lui reprenne annonce la couleur : ton tour viendra mais pas tout de suite.

Et surtout, le retour de Marion, la Indy-Girl la plus aimée de la série est une idée géniale : non seulement, cela boucle la boucle puisque les deux héros se marient enfin, mais surtout cela permet d’avoir un personnage que nous connaissons déjà, donc de s’identifier plus facilement. Et ça, c’est vraiment bonnard. Surtout que  Karen Allen assume ses rides et impose son visage qui en a vécu !! Comment a-t-on pu se passer d’elle aussi longtemps ?

D’un point de vue action, le film est un peu plus lent que les autres. Là aussi, Spielberg et Lucas ont résisté à la surenchère, introduisant de longues plages où la cervelle prime sur le muscle. Mais quand ils se lâchent, ils ne font pas dans la dentelle : poursuite dans la jungle, attaque de fourmis géantes (qui rappelle un peu la scène de La momie avec les scarabées), chute vertigineuse dans des rapides, entrée dans le temple avec ce gigantesque escalier escamotable, révélation finale… N’en jetez plus, la cour est pleine. Efficacité maximale pour une dernière demi-heure d’anthologie, rythmée, drôle, délirante, quasi parfaite.

Mais l’aspect le plus important du film, sans doute celui qui l’a grillé auprès d’une partie du public, c’est cette volonté de mettre le film dans les années 50 mais de faire un film des années 50. Tout y est : le péril rouge, les insectes géants, la parapsychologie de bazar, les querelles entre bandes de jeunes, le péril atomique, les extra-terrestres, les soucoupes volantes. Un incroyable catalogue de tout ce que l’on projetait dans les drive in des 50’s. En fait, le film fonctionne totalement à la nostalgie. Mais pas celle des années 80, celle de la jeunesse de Lucas et Spielberg. Logique que les jerks aient un peu de mal avec ce film. Lucas étant devenu la cible numéro 1 de certains cinéphiles, logique aussi que cet Indy 4, dont il revendique la paternité, soit leur nouvelle cible.

Film héritier des années 80 par son style mais plongeant ses racines dans les années 30 pour le serial et les années 50 pour le contexte, Indiana Jones et le crâne de cristal est forcément un spectacle qui sera ré évalué dans les années à venir car il condense à la fois l’œuvre et les idées de Spielberg tout en divertissant un maximum. Il rend également justice à l’idée de Lucas du cinéma : pas forcément un spectacle qui submerge le spectateur jusqu’à plus soif, mais un simple film d’aventure à l’ancienne mâtinée de quelques notions d’histoire.

Au final, ce 4e Indy  n’est pas forcément ce que l’on attendait. Mais vous savez quoi ? c’est tant mieux !!
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20 juin 2008 5 20 /06 /juin /2008 07:15
Le pitch : en 2054 , le crime n'existe plus à Washington. Une unité spéciale, la pre-crime , voit les crimes avant qu'ils ne se commettent et arrêtent les futurs assassins avant qu'ils ne commettent l'irréparable. La raison de ce miracle : 3 mutants, les pré-cogs, qui voient le futur. Utilisés comme de véritables objets et traités comme des animaux savants, les pré-cogs ne se trompent jamais. C'est du moins ce que croit John Anderton, patron de cette precrime, jusqu'au jour où les precogs révèlent que le prochain assassin , c'est lui !

Tiré d'une nouvelle éponyme du génial Philip Kindred Dick (auteur entre autres de Ubik, Le maître du haut château ou Les androides rêvent-ils de moutons électriques ?) , Minority Report est tout simplement une claque monumentale et la confirmation que les grands génies de la SF et du fantastique ont décidément fait de 2002 l'année de leur triomphale retour.

En 1992 , tout le monde enterrait Spielberg. Always avait été un échec et Hook n'était pas à la hauteur de son propos. Dépassé par Cameron dans la course à la technologie, ringardisé par Tim Burton quand il s'agissait de créer de nouveaux univers, la presse et une partie des spectateurs ne donnaient pas cher de l'avenir du golden boy. Les années 75-85 étaient loin. Et puis 93, premier coup de poing : Jurassic Park et sa révolution dans le monde des effets visuels. Carton mondial . Et surtout retour d'une mise en scène alerte et efficace. Quelques mois après Spielberg offrait au monde La liste de Schindler et devenait, enfin, aux yeux de l'établissement , un cinéaste majeur. Bien sur, les cyniques crachaient toujours sur lui mais qu'importe, de ces années de doute (en gros de 87 à 92) où seul Indiana Jones et la dernière croisade lui avait permis de retrouver le public (mais pas la presse) , Spielberg avait gardé une rage intérieure et inconsciente , celle d'abolir toutes les frontières du 7eme art. En 97, Le monde perdu fut son dernier film pensé pour le public, selon ses propres aveux. Reste que cette séquelle est largement supérieure à l'original, plus sombre, plus mouvementée. Puis vinrent Amistad et surtout Il faut sauver le soldat Ryan. Cette fois ci , plus de doute, Spielberg fait ce qu'il veut. Sa fresque sublime ne fait pas que contenir les images les plus efficaces sur la 2eme guerre mondiale, elle marque surtout sa volonté de s'affranchir des désirs du public. AI qui suivra 3 ans plus tard confirme cette tendance. En filmant ce conte inspiré par Kubrik, il ne fait pas que nous offrir le plus beau film de SF depuis Abyss . Il nous ouvre tout simplement son âme. Les cyniques se défouleront d'ailleurs sur ces films, certaines personnes osant même parler de gâtisme.

Pourquoi ce récapitulatif ? Parce qu'il faut comprendre que désormais Spielberg tourne pour lui les histoires qu'il voudrait voir. Il n'a plus rien à prouver. Sa richesse le met à l'abri pour plusieurs générations. Sa filmographie enterre celles de n'importe qui. Ses productions cartonnent et son studio Dreamworks offre régulièrement des films hors normes. Or, on sait que quelqun qui décide de s'affranchir des désirs du public mais surtout des studios est un homme dangereux, prêt à concrétiser tous ces fantasmes. Spielberg ne fait jamais de projections test . Son sens du montage l'empêche de sombrer dans les délires actuels. Mais surtout, son don - car s'en est un, à l'instar du don de Michael Ange pour la peinture - lui permet de transcender son sujet.

Le pitch de Minority Report , un efficace faiseur l'aurait transformé en un actionner burné. Un tâcheron en aurait fait un buddy movies stupide avec un pre-cogs rigolo . Spielberg lui traite la SF comme un film contemporain. On peut même dire qu'il s'agit de son premier film contemporain depuis ...Sugarland Express en 1974. La SF n'est ici qu'un accessoire au service de l'histoire. Les effets visuels sont grandioses mais jamais on ne se dit "woah" ! Les décors en imposent mais la caméra les effleure. La technologie de 2054 est traitée comme celle de 2002. Filme-t-on une cafetière de manière insistante dans un polar actuel ? Reste donc deux points d'accroche : l'histoire et les acteurs !!

Les acteurs, Tom Cruise en tête, font le film. Cruise, on le sait depuis Né un 4 juillet si on est honnête, est un grand. Qu'importe son physique de playboy ou son image idéale qu'il entretient avec un soin maniaque. Des films comme Rain Man, Entretien avec un Vampire, MI et MI:2 , Magnolia ou Eyes Wide Shut sont là pour le prouver. Ici, il habite son personnage, retrouvant d'une part les délices de l'action man des MI mais aussi la part d'ombre de Lestat. Dans Minority Report, Anderton est , sous les apparences, un homme brisé. Il a perdu son fils, sa femme l'a quitté, sa vie en dehors du travail est un champ de ruines, il se drogue (un thème cher à K Dick). Si on excepte la drogue, nul doute que la vie de Cruise est à l'image de Anderton : réussite professionnelle exceptionnelle mais vie privée tournant au désastre (son divorce humiliant d'avec Nicole Kidman, son ulcère, son rejet par l'établissement..). Cruise est donc en tout point exceptionnel. Et les seconds rôles ne le sont pas moins. Comme à l'habitude chez Spielberg , ce sont de solides acteurs qui tiennent le film , qui font avancer l'histoire. Pas de cabotinage, pas de clin d'oeil...

Et puis il y a l'histoire : vertigineuse, démente, délirante et pourtant d'une limpidité à toute épreuve. Ce qui disent ne pas avoir compris devraient se poser des questions. Tout le film tend vers la scène du meurtre qu'est censé commettre Anderton. Tout se définit par rapport à elle. Et pour se faire, Spielberg ose adopter une attitude anti-blockbusters. Après une scène d'ouverture à fond les manettes , le rythme va ralentir , excepté pour la tentative d'arrestation de Anderton (en gros, la course poursuite la plus fantastique de ces dernières années). Plus Anderton s'enfonce et va vers son destin, plus il se pose de questions et plus le film est lent. Formidable construction donc qui permet au spectateur de s'en poser des questions . Et sacrément inconfortables : doit on sacrifier notre vie privée sur l'autel de la sécurité ? est-il légitime d'utiliser des êtres humains comme des machines ? Faut-il enfermer des hommes qui n'ont encore rien fait ? Notre destin est-il tout tracé ? En multipliant les scènes d'anthologie et en privant son héros de la vue, Spielberg ne fait qu'accentuer le doute. En changeant ses yeux et en acceptant d'en perdre l'usage durant plusieurs heures, Anderton ne fait en fait que les ouvrir sur une autre réalité. De plus, le fait de se sentir coupable met à mal toutes ses idées arrêtées , voire son entêtement à défendre le système coûte que coûte. Car Anderton au début du film est un croyant, voire un fanatique. Mis dans la peau de l'accusé, il perd ses repères puis ses croyances , enfin il sera l'artisan de la perte du système qu'il a tant aimé. Tombant de Charybe en Scylla , le héros devient , par nécessaire , plus ouvert , plus tolérant. Il se fera même l'artisan de la liberté des précogs alors qu'il les considérait comme des objets au début du film. Implacablement , l'histoire avance.

Et ce jusqu'à la scène finale où un seul coup de feu sera nécessaire pour régler l'histoire . Pas d'explosion, pas de destructions massives, juste un effet !! Notons que certains detracteurs du film reprochent cette fin anti spectaculaire alors qu'ils sont les premiers à se plaindre de la pyrotechnie envahissante des blockbusters. Plus intéressant, certains spectateurs estiment même que la dernière partie du film est un rêve. Si certains éléments pourraient l'accréditer, notamment les paroles du geôlier, je pense personnellement que la fin se passe dans la réalité, restant en cela fidèle à la nouvelle. Mais chacun peut se faire sa propre opinion et sa propre fin.

Fidèle à son équipe, Spielberg a de nouveau fait appel à ses collaborateurs : Williams à la musique, Khan au montage au montage, Janusz Kaminski à la lumière (le chef op le suit depuis La liste de Schindler) et ILM pour une partie des majestueux effets visuels. De par cette cohérence , le film reste donc dans l'esprit des précédents du cinéaste mais le sujet entraîne également le film sur d'autres rives : les images sont sales, le cadre est parfois chaotique, certaines scènes sont crues... Il est clair qu'un nouveau Spielberg est en train de naître.

J'aimerais également revenir sur la scène du centre commercial. Anderton et Agatha sont traqués. Agatha se sert alors de ses dons pour aider le policier. Cette scène, magistralement mise en image, montre d'une part que la pré-cogs ne voit pas que les meurtres futurs mais tout le futur et que son don pourrait être employé de manière beaucoup plus humaine. Et surtout, Agatha , comme Anderton , ouvre les yeux sur le monde réel. C'est également Agatha qui offre à Anderton la possibilité de changer son propre futur donc de mettre en échec Precrime.

Minority Report est donc une oeuvre phare, un chef d'oeuvre de plus pour tonton Steven. Et même s'il ne fait pas autant d'entrées que Jurassic Park , les spectateurs présents auront eu l'impression de frôler la lumière à maintes reprises.
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13 juin 2008 5 13 /06 /juin /2008 07:15

Mais comment fait il ? Il y a 18 mois, Spielberg nous offre AI, l'un des plus beau film (le plus beau ?) de SF de l'histoire du cinéma. Il y a 6 mois, on se prend en pleine tronche Minority Report, extraordinaire polar noir dont l'intensité n'avait d'égal que la perfection technique. Et voilà que déboule Arrête moi si tu peux, oeuvre magistrale, maîtrisée de bout en bout et véritable joyaux de comédie.

Depuis quelques années, conscient de son rôle sur la scène mondiale du cinéma, Tonton Steven a décidé de faire jouer des stars afin de leur offrir des écrins à la mesure de leur talents. Après Tom Hanks et Tom Cruise, c'est au tour de Leonardo di Caprio de se laisser happer par la patte du maître. La star de Titanic (qui fait un extraordinaire doublé avec Gangs of NY) joue donc le rôle du plus jeune escroc de l'histoire des USA, un gamin qui outre le fait d'avoir émis pour plusieurs millions de dollars de chèques, s'est fait passé pour un pilote d'avion, un pédiatre et un juriste. Sacré palmarès. Mais qu'un héros puisse exister, il lui faut un adversaire à la hauteur. Tom Hanks est donc l'agent du FBI qui le poursuit, à la fois fasciné et agacé par ce jeune prodige qui lui glisse entre les mains à chaque fois.

L'histoire entremêle les différents moments de la vie de Frank Abagnale (l'arrestation , l'ascension et la chute) sans doute pour rompre une monotonie qui découle souvent du biopic , genre relativement balisé mais il le fait avec un bonheur total et un montage sans faille . Assisté par son équipe habituelle depuis La liste de Schindler, Spielberg montre qu'il est capable de réellement tout filmer, de tout transcender. Ceux qui osent encore douter de la maestria de ce géant sont dotés d'une sacré dose de mauvaise foi.

Mais la plus grosse surprise vient de sa direction d'acteur. Ici les comédiens sont éclairés de face et chaque réplique, chaque acte a été pensé, chorégraphié. Di Caprio est éblouissant, Hanks magistral et acceptant totalement de jouer un homme plus proche de la vieillesse que de la jeunesse, Walken retrouve enfin un rôle à la mesure de son énorme talent (Revoyez Dead Zone pour avoir une telle intensité) et surtout prouve qu'il n'est pas condamné à jouer les salauds . Quand à Nathalie Baye, si l'on peut regretter qu'elle soit un peu mise en retrait (après tout le film est une histoire de relation père-fils) , elle irradie par sa présence toutes ses scènes. Casting parfait donc pour histoire incroyablement maîtrisée. Sans compter les nombreux seconds rôles qui donnent au film un cachet étincelant et pétillant.

Arrête moi si tu peux est une comédie, la première depuis Indy 3 , il y a 14 ans. Mais, Steven oblige, on ne verse jamais dans le grossier ou le débile. Le rire jaillit des dialogues , des situations (la scène où Abagnale se fait passer pour un membre des services secrets ou celle où il fait croire qu'il est le nouveau prof) mais ne prend pas le pas sur l'intrigue . Là où un tâcheron en aurait rajouté dans le gag , histoire de faire marrer le public facilement, Spielberg préfère souligner le décalage entre l'incroyable culot du jeune escroc et l'incroyable naiveté des adultes. Enfin, notons le générique, véritable explosion de malice et de joie qui rappelle les grands génériques des 60's.

Une fois de plus, Spielberg réussit totalement son pari et film après film construit une filmographie qui laissera sur le carreau la quasi totalité des réalisateurs de l'histoire du cinéma . Que l'académie des césars, incapable de s'en rendre compte (elle ne l'a jamais récompensé ni pour ET, ni pour La liste de Schindler, ni pour Il faut sauver le Soldat Ryan, ni pour Minority Report !!) aille se faire voir.

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10 juin 2008 2 10 /06 /juin /2008 07:17
Je continue donc ma rétrospective Spielberg , toujours à rebours. Place à un des films les plus attachants du maître, injustement qualifié de mineur.

Le pitch : originaire d'un pays de l'est imaginaire victime d'un coup d'état, un homme se trouve coincé dans une faille du système des douanes américains. Sans passeport, il ne peut entrer aux USA mais sans pays reconnu par les USA, il ne peut rentrer chez lui. Petit à petit  , il va organiser sa vie...


Spielberg Revolution !! Pour la première fois depuis Surgaland Express, Tonton Steven nous offre un film contemporain qui ne soit pas fantastique. Pas de dinosaure, pas de petit martien égaré, pas de police devinant vos pensées...rien qu'une histoire se déroulant à notre époque, sans artifice, sans scène d'action et sans prouesse technique délirante. Hormis la reconstitution de Kennedy Airport (iun décor dément cela dit en passant), Le terminal est un des films les plus simples de Spielberg, ne reposant que sur ses acteurs et ses dialogues. Très peu de musique, un décor unique, des ellipses narratives.. Pas de doute, le cinéaste s'est fait plaisir et a envisagé son film comme une récréation.

Cela dit , la mue était perceptible avec Arrête moi si tu peux où le cinéaste était revenu à la comédie 23 ans après 1941. Moins d'artifice et plus d'humanité. Après 5 énormes films (Lost Word, Amistad, Ryan, AI et Minority Report, excusez du peu), Spielberg a éprouvé le besoin de souffler. Mais, Arrête moi... se déroulant dans le passé, il fallait quand même en passer par une grosse logistique. Ici, rien de tel et le budget de 60 millions de dollars (un petit budget désormais pour les normes d'Hollywood) en ait une preuve flagrante, même si le cinéaste a toujours fait preuve d'une grande économie.

Alors qu'en est-il de cette orientation nouvelle ? Sympa !! En revenant aux sources des films de Capra, il en retenu le meilleur et a délibérement tourné le dos au cynisme qui aurait pu torpiller Le Terminal. On a parlé de critique acerbe envers la politique d'immigration des USA ? Pas vraiment, puisque même le chef de la sécurité se laissera aller à de meilleurs sentiments. Et de toutes façons, cette situation ubuesque aurait pu se produire partout . La preuve, l'inspiration vient d'un citoyen iranien coincé en France. Ceux qui ont profité du film pour assouvir leur americophobie en sont pour leur frais.

Ni méchant ni engagé, Le Terminal dégage un humour naïf magnifié par le jeu extraordinaire de Tom Hanks qui , là aussi, se retrouve nu devant Spielberg. Pas de grosses logistiques évoquant le débarquement et pas de premier rôle pour lui voler la vedette (qu'il ne recherchait d'ailleurs pas). Hanks est tout simplement merveilleux et redevient le simple gars que l'on a apprécié dans Nuits blanches à Seattle ou dans Seul au Monde : un acteur au top et qui mériterait un 3eme Oscar pour une telle performance. Bien sûr, il ne l'aura pas car depuis quelques années, il ne suffit plus de bien jouer pour obtenir la statuette, il faut s'enlaidir, se la jouer débile mental ou travestir sa personnalité pour séduire l'Académie.

Hanks porte le film, trop peut être, et imprègne l'histoire de sa morale que certains jugent simplette : le monde peut être beau si l'on s'en donne la peine. En restant honnête envers et contre tout, son personnage change les autres et les rend meilleurs. Certes, cette morale est très américaine (ce qui fait que le film n'est pas si critique que cela) mais après tout, elle a le mérite d'être inoffensive et surtout de s'inscrire dans une logique rassurante. Conservateur ? Sans doute mais qui a dit que la nouveauté était forcément meilleure ?

Les seconds rôles servent Hanks et lui assurent une continuité dans l'histoire, donnent leur lot de rebondissement et permettent au héros d'aller d'un point A à un point B, émotionnellement s'entend. Catherine Zeta Jones, qui travaille directement pour Spielberg pour la première fois, est également merveilleuse dans ce rôle de femme enfant qui ne sait finalement pas ce qu'elle veut vraiment. Et en refusant un happy end attendu (non, les deux tourtereaux ne vieilliront pas ensemble), Spielberg refuse finalement de céder à la facilité.

Car cet immense réalisateur, qui n'a plus rien à prouver, qui incarne le cinéma actuel, n'a toujours pas choisi la voie de la facilité et de la renonciation. A l'heure où les plus grands metteurs en scènes d'Hollywood comme Mc Tierman ne parviennent plus à imposer leur vision, à l'heure où on peut faire un film en montant des images de propagande, à l'heure où des hommes aussi respectables qu'Emmerich crachent dans la soupe , à l'heure où les studios ne jurent plus que par séquelles, comics, stars bankable, il est rassurant de voir que Spielberg reste intègre et ne fait pas forcément le film que le spectateur veut voir.

Savourons cet hymne à l'espoir et cette volonté de revenir à un cinéma plus pur, plus simple, plus humain.
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5 juin 2008 4 05 /06 /juin /2008 06:32
Je continue ma retrospective Spielberg. Retour en 2005 quand il s'attaquait à son 2e remake.

Le pitch : une invasion extraterrestre vue à travers les yeux d'un américain moyen et de sa famille.


Spielberg nous surprendra toujours. Après deux films portés sur la comédie et sur les personnages, il revient à la SF en adaptant ce classique , déjà porté à l'écran par Georges Pal dans les années 50. Surprise d'autant plus grande que le film a été écrit, filmé, monté et distribué en moins d'un an et qu'il ne figurait pas dans les projets immédiats du cinéaste. A l'arrivée, le résultat va au delà des espoirs suscités car on n'a pas là juste une adaptation mais une réflexion brutale sur le terrorisme moderne qui ne vire jamais à la démonstration pyrotechnique.

Spielberg depuis 1998 ne tourne plus qu'avec des stars. L'homme qui, autrefois, choisissait ses acteurs parmi les seconds couteaux , a décidé de mettre son talent au service de gens déjà confirmés. Il retrouve donc son partenaire de Minority Report mais en casse l'image. Ici, Tom Cruise, parfait, ne commet aucun acte héroïque, se conduit comme une personne normale, enclin à un certain égoïsme (la scène de la voiture), ne comprend pas ce qui se passe et subit les évènements. Un traitement gonflé de la part de l'acteur qui cannibalise généralement ses films. Ici, il est certes de toutes les scènes (ou presque) , est le moteur du film (sa fuite constitue le principal argument du scénario) mais à aucun moment il n'influe sur l'histoire. Tout juste se contente il d'indiquer aux soldats, vers la fin du film, que le bouclier de protection a disparu. Jamais il ne prend l'initiative, ne monte dans un avion ou dans un char pour abattre les martiens. Sa seule action "héroïque" consiste à lancer deux grenades dans le corps d'un tripode et , même à ce moment, il est aidé par le reste des captifs. Le regard halluciné et terrorisé, Cruise rumine ses échecs tout au long du film (la scène où il pleure après la perte de la voiture est symbolique de ce manque de confiance) et laisse à son fils le soin de jouer les héros. Et que dire de Dakota Fanning, absolument parfaite et d'un réalisme absolue : jamais ce petit bout d'actrice ne surjoue et ses réactions sont d'un naturel incroyable. Elle a peur et ne comprend pas non plus ce qui lui arrive. Et jusqu'au bout, c'est une protection qu'elle va chercher : chez son frère, chez sa mère pour accepter, au final, celle de son père.

Réalisme : cela peut sembler étonnant pour un film qui parle d'invasion extra-terrestre mais c'est pourtant le cas. Ici, Spielberg écarte tous les clichés du genre, magnifié par ID4. Pas de plan du bureau ovale, pas de président s'adressant à la nation, pas d'images télé en boucle, pas de militaires bombant le torse. Il reprend en cela la thématique de Signes où une famille désunie assistait elle aussi à la fin du monde. Mais là où Shyamalan basait tout son film sur le minimalisme, Spielberg mixe le spectaculaire avec l'intime. Ainsi, les scènes de destruction massive ne sont jamais gratuites mais sont surtout là pour inscrire les personnages dans la panique. Et le cinéaste en profite pour multiplier les symboles : ces hommes et femmes réduits en cendre renvoient à la pluie de cendre de La liste de Schindler mais aussi aux images du 11 septembre . Rappelez vous ces New Yorkais fuyant l'effondrement des deux tours et recouverts de poussières. Autres images chocs : ces vêtements pleuvant du ciel , prouvant que l'enlèvement des hommes par les tripodes n'a qu'une issue fatale. Là aussi, il faut remonter à Schindler. Quand les tripodes rasent les villes, les images évoquent à la fois le Blitz que subit Londres de 40 à 44 (et par un sinistre ricochet, les attentats de ces deux dernières semaines) mais aussi les attaques du 11 septembre. Le cinéaste ne cherche jamais à se justifier ni justifier les motivations de ses agresseurs. Comme le dit Tim Robbins " Ils ne sont pas venus faire la guerre mais nous exterminer". Tout comme les nazis qui ne faisaient pas la guerre aux Juifs, à l'armée rouge qui ne faisait pas la guerre aux paysans aisés  , que les Chinois ne font pas la guerre aux tibétains ou que les islamistes ne nous font la guerre. Ici, la logique est simple : nous ne sommes que des insectes et les martiens appliquent la loi du plus fort.

On peut critiquer ces images d'autoroutes s'écroulant, ces villes réduites en cendre, ces êtres humains vaporisés par le rayon ardent (qui rappelle Hiroshima) et le trouver "voyeuses". Mais, en sacrifiant au spectacle, Spielberg ne flatte pas nos instincts. Déjà les scènes sont courtes, intenses, filmés comme des actualités . Réalisme toujours. De plus, elles ne sont là que pour montrer la détermination des agresseurs. Enfin, elles apparaissent pour insuffler la peur et le sentiment d'inéductabilité dans l'esprit du spectateur. Et le miracle final , tout droit tiré du livre de Wells, n'en apparaît que plus grand. C'est d'ailleurs la fin qui peut constituer une déception. Non pas à cause de son côté non spectaculaire (après tout, on n'est pas là pour cela) mais parce que la production avait laissé entendre une fin inédite. Or, ceux qui ont lu le livre découvre un dénouement en tout point semblable à celui imaginé par Wells , et repris par Georges Pal. C'est la nature qui sauve l'homme. J'avoue que j'espérais autre chose mais là aussi Spielberg reste fidèle à son idée : comment imaginer que Tom Cruise, après avoir subi tout le film, puisse trouver une solution ? Réalisme toujours !!

Si le cinéaste choisit cette approche c'est sans nul doute pour nous interroger sur notre monde. Le cinéaste , désormais, veut filmer le plus possible mais entend inscrire ses films dans un monde réel. Après nous avoir parler du sacrifice, de l'amour maternel, de la justice toute puissante, de l'usurpation et l'Amérique dans ses derniers films, il se penche donc sur la peur et sur l'agression. Ici, Cruise a peur : peur de s'engager puis peur devant l'inconnu. Si son fils choisit la voie de la résistance, sans doute inutile mais qui lui permet de sauver sa dignité, le père ne cherche pas à surmonter sa peur, au contraire, il va l'utiliser pour se justifier. Et son seul acte réfléchi se fait derrière une porte quand il tue (?) Tim Robbins. Si on peut croire quelques instant à son héroïsme, on découvre vite un personnage qui justifie ses actes les plus vils (le vol de la voiture et son refus d'aider les autres) par une trouille réelle. Car , en montrant une personne moyenne, fuyant les armés d'extermination (une image qui rappelle l'exode des civils lors de l'attaque de la France en 1940), Spielberg ne fait que nous tendre un miroir. Nous aimons nous convaincre que nous, nous réagirions de manière héroïque devant une telle menace mais est-ce vrai ? En l'absence de réelle épreuve, il est facile de s'imaginer aux héros. Mais dans les faits , que se passerait-il ? Serions nous enclin à nous servir de nos familles pour ne rien faire (ils ont besoin de moi, je ne peux pas aller me faire tuer) ? Nous remettrions nous à des autorités en espérant qu'elles trouvent une solution ? Tous nos actes de résistance consistent le plus souvent à signer une pétition mais serions nous prêt à prendre une arme pour aller nous battre sur un théâtre lointain, sans garantie de survie ?

Toutes ces questions, Spielberg nous les posent et nous laissent avec nos réponses. En utilisant un Deux Ex Machina , ils évitent aux personnages l'extermination mais aussi les confortent dans l'idée qu'une puissance nous protège et que, au final, il suffit de survivre. Singulier pied de nez de la part d'un cinéaste qui s'était toujours attachés à dépeindre des personnages qui agissent.

La guerre des mondes est bel et bien le digne héritier du Soldat Ryan mais il pose les questions inverses en nous plaçant devant notre capacité à céder à la lâcheté. En revenant au de guerre, Spielberg signe là une de ses oeuvres les plus fortes mais, et c'est souvent ainsi, celle qui, pour le moment, l'une des plus sous-estimée en matière de contenu social. Une fois le choc digéré, il sera temps de chercher à comprendre l'oeuvre , de chercher ses réponses, même si ceux ci risquent d'être dérangeantes.
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29 mai 2008 4 29 /05 /mai /2008 07:04

Le pitch : suite aux meurtres d'athlètes israéliens lors des jeux olympiques de Munich par l'organisation palestinienne Septembre Noir, le Premier ministre de l'état hébreu, Golda Meir, décide de l'opération Colère de Dieu. Elle consiste à traquer et à tuer les responsables du carnage. Munich va alors suivre le parcours sanglant des agents du Mossad.

 

Munich a une énorme qualité qui excuse ses défauts : son refus du manichéisme. Passons sur l'interprétation sans faille (Eric Bana y est stupéfiant !!) et sur la qualité, somme toute normale, chez le réalisateur du film et intéressons nous à la vision du monde qu'il nous offre.

 

De Spielberg, on connaît le versant historique : La couleur Pourpre, La liste de Schindler, Amistad, Empire du soleil, Il faut sauver le soldat Ryan et même Arrête moi si tu peux. Mais dans tous ces films, avec une exception particulière pour Ryan, les deux camps étaient relativement bien identifiés. L'échec d'un film comme Amistad tenait, par exemple, dans son traitement bien trop brutal des personnages. D'un côté les gentils esclaves luttant pour leur liberté aidés par de sympathiques yankees abolitionnistes et de l'autre, des salopards vendeurs d'hommes. Remarquez, il aurait été dur de faire le contraire, mais le film aurait gagné en subtilité. Reste à savoir comment le traitement aurait pu être différent. De plus, Amistad avait une valeur pédagogique : faire connaître aux jeunes générations le drame de l'esclavage en y incluant tous ses thèmes : le commerce triangulaire, la responsabilité des tribus qui vendaient leurs prisonniers, la rapacité des Européens, le cynisme des américains vis-à-vis du bois d'ébène...

 

Disons le tout de suite, à l'annonce du projet Munich , j'espérais un film manichéen car , drapé dans mes certitudes , je ne peux pas imaginer des terroristes autrement que comme des fils de chien sans scrupule . Pour moi, un intégriste, quel qu'il soit, qui se fait sauter dans une foule de civils vaut moins que la bave qui souille la gueule de mes chats. Mourir au nom d'un dieu  dans le seul but d'accéder à un paradis de jouissance me dépasse. Pour Munich, je voyais donc déjà des agents du Mossad courageux abattre des terroristes palestiniens sanguinaires. En clair, Munich était, dans mon esprit, Rambo IV en terre sainte.

 

Spielberg est donc allé de l'autre côté et il a osé montrer que l'homme peut être capable du pire. Il l'avait fait dans Schindler mais sur cette cause, à part quelques révisionnistes et négationnistes, peu de monde pouvait contester les faits que le grand réalisateur nous lançait à la figure. Ici, il ne prend personne dans le sens du poil, bien au contraire. Le massacre de Munich sert de prétexte à une traque impitoyable et par une science de la mise en scène et un talent de raconteur hors du commun, Spielberg parvient à inverser notre sentiment. Au départ, on espère voir des James Bond casser du terroriste, jubiler comme lors d'un True Lies et on en arrive à éprouver la souffrance des membres de septembre noir. Sans pour autant les plaindre.

 

Munich montre combien  la vengeance est amère quand elle n'est pas faite avec la justice à ses côtés. Et là aussi, il va à l'encontre de nos idées reçues. Soyons honnêtes, combien d'entre nous n'a jamais dit "il faudrait rétablir la peine de mort pour untel ou untel" à l'évocation de quelques crimes crapuleux et honteux

 

Le rejet qu'a pu engendre Munich chez certains, y compris dans la communauté juive, peut alors s'expliquer. En humanisant ses terroristes et en instillant le doute chez les agents du Mossad (alors que les vrais acteurs de ce drame n'ont jamais rien regretté, si l'on en croit leurs déclarations), Spielberg s'écarte de la sacro-sainte vérité et se lance alors en pleine fiction. Il transforme un fait-divers tragique en un thriller haletant, ultra-documenté (le film jurerait avoir été filmé dans les 70's) et ne s'embarrasse pas de subtilités. On se rappelle alors que tonton Steven n'est pas seulement l'un des plus grands réalisateurs de l'histoire, c'est aussi l'un des plus efficaces. Débarrassé d'un carcan moral, il se livre alors à une extraordinaire plongée dans les méandres de l'âme humaine. Le meurtre pour venger le meurtre, la violence pour exorciser la violence et au final, quoi ?

 

De personnes que je respecte se sont élevées contre le film (je pense à Guy Millière, entre autres) et y ont vu une source du mal. Pour ma part, Munich est une oeuvre de rédemption qui aura fait chanceler mes idées reçues l'espace d'un moment. Mais je comprends que l'on puisse détester le film, que on puisse le haïr. Peut-être parce que je ne suis pas impliqué, parce que je n'ai pas connu les attentats suicides. Peut-on en vouloir à ceux qui refusent de tendre la main à ceux qu'ils voient comme des meurtriers. Et la récente victoire du Hamas est peut-être là pour nous montrer que la démocratie n'est jamais acquise.

 

Mais, dès que j'ai pu voir de nouveau, ces civils irakiens, mes frères, massacrer par les bombes de Zarquaoui, alors de nouveau revient le spectateur lambda qui espérait un Rambo IV. Mais dans un coin de mon esprit, Munich restera une autre vision, une voix qui me dit que la vengeance ne règle pas forcément grand chose. Pas facile de se poser de telles questions.

 

Le courage de Spielberg est, une fois de plus, d'avoir été là où on ne lui demandait pas d'aller. Grâce lui soit rendue pour avoir osé ébranler nos convictions. Mais c'est aussi le courage d'avoir osé montrer la naissance du terrorisme moderne. Car Septembre noir est la matrice du 11 septembre, la naissance d'un terrorisme médiatique qui reprend les expérimentations des nazis sur le pouvoir de la télévision et des médias. En abordant de front cet aspect, et en ne l'édulcorant pas, Munich fait aussi oeuvre de mémoire.

Puis en insistant sur les doutes, les erreurs, il fait oeuvre alors de pédagogie sanglante : pour autant que l'on pense légitime Colère de Dieu, comment ne pas se dire que, au final, on en revient à cette vieille loi du Talion, banni du nouveau testament mais, hélas, remis au goût du jour par Mahomet qui massacra sans frémir la dernière tribu juive de Médine   , les Banou Quoraïza.

 

Munich est donc un film complexe, âpre, à l'accès difficile et dont il est bien ardu de se débarrasser une fois vu. Bref, il n'est pas ce que j'attendais. Et c'est tant mieux.

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23 mai 2008 5 23 /05 /mai /2008 06:25

Indian Jones n’a pas fini de faire couler de l’encre. Mais au delà de jugement lapidaire, voici 3 extraits de critique qui analyse le film de manière intelligente et vont au delà du « bah, c’est nul ». Enjoy

 

Je ne vais pas jeter la pierre à ceux qui n'ont pas aimé mais après avoir eu la chance de le voir aujourd'hui, je me demande pourquoi toutes ces réactions négatives. Qu'attendait-il au juste ? Le Messie ? Ou plutôt, je comprends car ce genre de réactions est le lot de tout gros films attendus depuis un certain temps et particulièrement celui-ci. Alors le film tient-il ses promesses ? Assurément, c'est  un super giga-spectacle comme on n'en fait plus depuis longtemps.

Après un générique plutôt étrange qui fait très American Graffitti, on plonge de plein pied dans l'aventure pour ne pas lâcher jusqu'à la fin et ce sans aucun temps mort. Le film est effectivement filmé à l'ancienne avec une photographie qui rappelle les autres films et une caméra stable qui ne tourne pas dans tous les sens, bref dès le départ on a l'impression de retrouver de vieilles connaissances que l'on vient tout juste de perdre.

Le film comporte pas mal de morceaux de bravoures dont une formidable course poursuite en Jeep à travers la jungle absolument énorme, je ne vous en dit pas plus. La fin ne m'a pas du tout gêné puisque je peut dire sans trop spoiler que ce ne sont pas vraiment, vraiment des extra-terrestres et qu'ils ne viennent pas vraiment, vraiment de l'espace. Spielberg joue aussi à fond sur la nostalgie en multipliant les clins d'oeil autant cinématographiques que musicaux. Les effets spéciaux ne sont pas envahissants et ils sont très imaginatifs notamment pour la fin.

Côtés acteurs Harrison Ford reprend brillamment son rôle fétiche avec panache. Shia La Beouf est la bonne surprise du film, loin d'énerver il assure la partie humoristique du film mais sans en faire trop et se permet de nous donner de belles scènes d'actions dont un combat à l'épée qui va  devenir anthologique, il se prend même pour Tarzan ! Cate Blanchett est excellente dans le rôle de la méchante et n'en fait pas trop également. Ca fait plaisir de retrouver Karen Allen, ses chamailleries avec Jones font beaucoup rire.

Bref, Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal est bien la grande aventure attendue, que certains soit passés à côté est vraiment dommage car le film vaut le coup d'oeil et il est à voir et à revoir, ce que je ne vais pas m'empêcher de faire très bientôt.

 

(Frédéric – Salles obscures)

 

Cela se traduit par un changement radical sur l’univers de la saga. Il aurait été facile de remplacer les années 30 par les années 50 et se dire que la diégèse est mise en place, mais cette facilité se traduit par une évolution du personnage, qui n’est plus clairement qu’un clown triste perdu dans une génération qui n’est pas la sienne : celle du pouvoir politique et financier, du jeunisme peu concerné et de la peur de l’ennemi et de son voisin. A l’instar de Munich, Spielberg change donc l’époque pour jeter un miroir sur notre époque.

 

Pour la première fois, Indiana Jones, forcément moins drole, n’est plus dépassé par les évènements, mais par son époque. Que faire face à la présence militaire et politique toujours grandissante, Américaine ou Communiste ? Que penser lorsque sous nos yeux l’horreur humaine (l’explosion atomique) semble acquise et normale, au sortir de 5 ans de guerre et de massacre ?

 

(Sylvain Perret – DVDVision)

 

Si l’on ne peut nier que Le Royaume du Crâne de Cristal respecte les codes les plus immuables de la trilogie originale, jusqu’à se plier à l’exercice de la « montagne » du plan d’ouverture, le film englobe un univers bien plus large que prévu, renvoyant autant aux trois premiers opus qu’à la série Young Indiana Jones (l’anecdote sur Pancho Villa) et même aux romans dérivés (l’expédition à laquelle participa Jones pour le gouvernement en 1947, l’évocation du personnage de Deidre, un amour de jeunesse, etc.). Sans doute motivé par Lucas, ce choix d’écriture éloigne d’un point de vue sensoriel le métrage des épisodes précédents, pour lesquels la continuité n’avait jamais été une fin en soi. Le résultat est à double-tranchant : si le personnage perd son aura d’icône figée dans son époque (par essence les années 1930), il devient définitivement ce que son créateur avec fini par voir en lui : un témoin privilégié des grands étapes historiques du XXème siècle. Rien d’étonnant, dès lors, à ce que Jones soit présenté ici comme un héros de guerre, ou qu’il soit désormais une victime du McCarthisme. Contaminé par la vision thématique de Lucas, Spielberg développe lui-même cette idée et transforme peu à peu son héros en observateur, au point de structurer sa mise en scène autour de deux plans larges proprement ahurissants, renvoyant aux couvertures des pulps et comics des fifties. Deux compositions qui propulsent le héros, miniaturisé au premier plan, dans l’inconscient collectif américain des années 50.

 

(Alexandre Poncet – Mad Movies)

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22 mai 2008 4 22 /05 /mai /2008 06:56

Indiana Jones, ce n'est pas Oskar Schindler !! Ce n'est pas non plus l'équipe d'agents de Munich !! C'est encore moins le petit David dans AI !!

Indiana Jones, c'est tout simplement un héros de BD transposé directement à l'écran !!

Alors, j'ai vu Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal comme un divertissement !!

Et j'en parlerais ainsi aujourd'hui !!

Car j'ai aimé. Non, j'ai adoré !! J'ai adoré voir revivre un héros qui a bercé mon adolescence.

J'ai adoré voir Spielberg montrer qu'il était toujours capable de faire une mise en scène lisible et claire.

J'ai adoré voir un scénario totalement délirant, invraisemblable (le frigo !!) mais à peine plus que celui des 3 premiers (rappelez vous le sous marin dans L'arche perdue).

J'ai adoré l'inversion de rôle par rapport à la dernière croisade. Indy devient le père mais cela ne lui plaît pas plus !!

J'ai adoré retrouver Marion, que l'on attendait depuis 27 ans !!

J'ai adoré les méchants , toujours aussi peu épais et caricaturaux !! 

J'aime quand le cinéma ne se prend pas la tête au premier degré et offre aux spectateurs de quoi s'évader.

Et j'aime quand Spielberg convoque ses obsessions pour casser les codes du cinéma.

J'ai vu, j'ai aimé et j'en fais cette première critique au débourré.

Pour la plus longue, celle où je me prends pour un vrai critique de cinéma, il faudra attendre un petit peu. 
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La côte

***** Chef d'oeuvre !!

**** Très bon, allez y vite !!

*** 1/2 * Entre le bon et très bon, quoi...

*** Un bon film

** Moyen, attendez la vidéo

* Comment ai-je pu aller voir ça ??

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