Le pitch : demi-dieu, Persée se voit entraîner dans la sauvegarde de la cité d’Argos, menacée par la colère de Zeus et d’Hadès.
Remake d’un petit classique sorti en 1980 (Le choc des Titans originel de Desmond Davis constitua, mine de rien, l’un des sommets de la carrière de Ray Harryhaussen et l’un des derniers grands films où l’on utilisa l’animation image par image), le métrage de Louis Leterrier constitue un divertissement très spectaculaire, bien rythmée mais manquant un peu d’ambition.
Je m’explique : si dans les années 80, la notion de série B avait encore un vrai sens, depuis l’avènement du numérique et la démocratisation des effets visuels, n’importe quel métrage peut se reposer sur des images jamais vues. Or, le premier Choc des Titans proposait des images tellement extraordinaires pour son époque que son scénario n’avait que peu d’importance. Il se contentait de suivre la mythologie d’origine en l’adaptant quelque peu, servie par des acteurs prestigieux.
En 2010, on attend désormais plus que de belles images. Celles de ce Choc des Titans sont extraordinairement spectaculaires. Le Kraken est devenu un monstre tentaculaire et gigantesque, la méduse est bien plus qu’une femme serpent qui bouge quasiment au ralenti, pégase est un superbe cheval noir magnifiquement animé. Les décors ont également pris un coup de jeune. Là où le film originel proposait quelques maisons à colonnes, quelques ruines ou quelques grottes à se mettre sous la dent, ici, on peut admirer des cités entières et gigantesques, des endroits lugubres à souhait et une invention délirante dans certains passages comme celle avec la barque de Charon. L’Olympe également a été totalement relooké. Finis les acteurs se déplaçant dans un décor évoquant vaguement la cité des Dieux, mais place à des personnages scintillants, survolant la Terre et placé sur un superbe plateau représentant notre monde. Et même si l’on peut regretter que la cosmogonie ne se résume qu’à un duo (Zeus et Hadès, Poséidon n’étant que vaguement montré) , cette représentation est superbe. Le film offre un même un clin d’œil avec la vision fugitive du petit hibou mécanique présent dans Le choc des Titans de 1980. Jugé sans doute trop enfantin pour les années 2010, le hibou est rapidement écarté ici !!
Dopé également par le renouveau du péplum engendré par Gladiator, un soin maniaque a été apporté aux armes, armures, costumes et tout ce qui fait une bonne reconstitution historique.
Nanti de tous ces moyens, on espérait donc un peu plus qu’un simple décalque du film d’origine. Certes, la notion de divertissement de luxe est respectée : à aucun moment, on ne s’ennuie, toutes les péripéties sont présentes (les 3 sorcières, Calibos – même si l’énigme a disparu, les scorpions, la méduse, le Kraken…) et le montage, plutôt efficace, offre de superbes combats. Mais un certain manque d’ambition empêche le film de s’élever au-delà de la simple série B de luxe. Et c’est bien dommage, car le scénario tente de temps en temps de se démarquer : ainsi l’opposition entre les hommes et les dieux est bien plus présente. Persée se révèle bien moins mièvre que dans le film d’origine et l’on sent un conflit en lui, partagé qu’il est entre la révélation de sa divinité et sa volonté de rester attaché au monde humain. Enfin, politiquement correct oblige, un héros féminin a été introduit en la personne de Io, mais son rôle reste finalement quelque peu en retrait, l’histoire hésitant entre l’obligatoire romance et la volonté de présenter une héroïne moderne. On appréciera par contre l'introduction des djiins dont le design est absolument magnifique et inventif !!
Tout ceci dénote une volonté de s’élever au dessus du film originel, mais cela reste ténu. Le film est très (trop ?) rapide et n’exploite pas totalement les situations. Certains combats laissent le spectateur sur sa faim (celui avec la méduse, trop rapidement résolu) et l’utilisation de quelques Deus ex Machina peut agacer.
Mais au final, Le choc des Titans est un film agréable, divertissant, jamais ennuyeux ou pompeux. Sam Worthington y consolide son image de nouvelle star de l’action et Louis Leterrier conforte son statut à Hollywood, un statut jamais encore atteint par l’un de nos compatriotes et qui pourrait bien le placer dans le club très fermé de Wolgang Petersen, de Roland Emmerich ou de Mike Nevel, à savoir des non américains qui deviennent de solides atouts pour les studios américains. Il lui faut cependant affiner son style et le rendre plus personnel s’il veut atteindre la notoriété d’un Scott !!
Reste la 3D. Ayant vu le film en 2D, il est clair que pas mal de scènes se prêtent à l’utilisation du relief et que le procédé qui consiste à gonfler le film doit donner de bons résultats. Cependant, on est bien plus près de l’astuce marketing que du projet réfléchi de Cameron. Ce procédé doit donc rester une étape dans la mise en place d’un cinéma tout 3D.
Le succès mondial du film est donc mérité et il est clair que l’on appréciera de revoir Le choc des Titans en blu-ray à la rentrée de septembre, en espérant pouvoir le comparer avec celui de Desmond Davis sur le même support.